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Lutte des classes au Wisconsin

La ville de la solidarité
Elizabeth Schulte et Lee Sustar
(Traduit par, et republié avec, l’accord de M. Bonhomme)

100 000 personnes du Wisconsin et d’ailleurs ont convergé à Madison samedi le 26 février pour une manifestation contre la loi du gouverneur républicain Scott Walker qui ferait disparaître les droits à la négociation collective des travailleurs du secteur public.
Dimanche soir [27 février], la police menaçait d’évacuer le bâtiment du Capitole [occupé depuis deux semaines par les travailleurs et les étudiants].  Mais les manifestants ont maintenu l’occupation grâce à des centaines de militants qui ont refusé de tenir compte des appels de certains leaders du mouvement d’abandonner.  La police a renoncé à ses menaces d’arrestations.

Mais le gouverneur Walker a fait monter la pression en menaçant de mises à pied dès le premier mars si les Démocrates du Sénat ne revenaient pas au Wisconsin pour voter sur sa proposition.  Quatorze sénateurs ont fui l’état plus tôt ce mois-ci empêchant un quorum permettant un vote.

La position pro-syndicale du syndicat de la police n’avait pas beaucoup d’importance le dimanche 27 février lorsque des centaines de flics se sont déployés pour tenter d’intimider les manifestants pour qu’ils abandonnent leur occupation.  La menace d’arrestations massives a suscité des débats sur la façon — et même la pertinence — de maintenir l’occupation.

La police avait annoncé qu’à compter de 16 heures le dimanche, ils fermaient l’accès au Capitole.  Vers midi, il était devenu évident qu’ils mettraient à exécution cette menace en empêchant quelque 2 000 personnes d’entrer au Capitole.

Au rez de chaussée, sous la rotonde, la prise de parole quotidienne au micro se transforma en une vive discussion.  Plusieurs orateurs [dont un élu démocrate qu’un candidat du Green Party avait failli défaire] appuyaient les ordres de la police de quitter le rez-de-chaussée. […]

Environ 100 personnes ont suivi l’élu Démocrate à l’extérieur du bâtiment où il a continué à plaider pour que la foule se disperse.  Mais à l’intérieur, les militants scandaient de « les laisser entrer » et la police a permis à environ 100 personnes d’entrer stimulant ceux qui voulaient maintenir l’occupation.

Néanmoins, plusieurs personnes qui avaient été parmi les dirigeants du mouvement — y compris des membres éminents du Teaching Assistants’ Association (TAA), le syndicat des employés diplômés de l’Université de Wisconsin — ont plaidé pour une retraite.

Plus tôt, le TAA avait accédé à une demande de la police de retirer les aliments du bâtiment, ce qui rendait beaucoup plus difficile l’occupation.  Dimanche après-midi, les membres de ce syndicat soutenaient que le seul choix était de quitter le bâtiment volontairement ou être arrêté. Plusieurs personnes qui ont voulu faire valoir le maintien de l’occupation et appeler à venir au Capitole se sont vues refuser l’accès au micro.

Malgré cela, des centaines étaient prêts à rester.  Cela est apparu clairement quand Katrina Flores, une chef de file du National Movimiento Estudiantil Chicano de Aztlán (MEChA) chapitre à l’UW, a réussi à obtenir le microphone et a fait valoir que si un nombre suffisant de gens étaient prêts à rester dans le bâtiment durant la nuit, la police ferait marche arrière.  Son argument a été repris dans le chant: “Stand our ground ! Stand our ground !”

Puis, juste après 18 heures, l’annonce a été faite que le sénateur républicain du Wisconsin Dale Schultz avait retiré son soutien à Walker.  La foule a éclaté de joie, voyant une fissure chez l’ennemi pour la première fois.  C’est alors que la police a commencé à jeter du lest et que le chef de police a annoncé que les manifestants pourraient rester pour la nuit et qu’on pouvait faire venir de la nourriture.

La décision prise par la police de faire marche arrière reposait probablement sur les retombées politiques des arrestations de masse.  Il aurait fallu des heures pour dégager le bâtiment de quelque 600 personnes qui étaient restés à l’intérieur.  Et les manifestants ne pouvaient pas être dénigré par Walker en tant qu’étudiants excités — les occupants étaient multi-générationnels et incluaient des syndiqués pompiers, électriciens et enseignants, ainsi que des étudiants diplômés et de premier cycle et du secondaire.

Toutefois, les syndiqués présents étaient là principalement en tant qu’individus, et non comme un contingent organisé.  Étant donné que la date limite pour essayer de fermer le Capitole avait été annoncée bien à l’avance, les syndicats auraient pu utiliser la manifestation de masse de samedi pour appeler à un soutien organisé soutenant l’occupation, comme ils l’avaient fait auparavant.  Leur incapacité à le faire — et leur prétendue entente avec la police — donnera lieu à de vifs débats sur l’importance de maintenir le contrôle de la « maison du peuple ».  Si les dirigeants syndicaux se sont pliés aux exigences de la police — qui, bien sûr, sont contrôlés par Walker — de prendre le contrôle intégral du Capitol, cela va diviser et affaiblir le mouvement à un moment crucial.

Pourtant, malgré le magnifique déploiement du pouvoir syndical samedi, les dirigeants syndicaux ont déjà accepté les demandes du gouverneur Walker pour des cotisations plus élevés des employés pour les soins de santé et les retraites — tant qu’il s’engage à maintenir la négociation collective et qu’il permette le recouvrement des cotisations qui soutiennent l’appareil syndical.  En d’autres termes, les dirigeants syndicaux sont prêts à appeler à des actions militantes pour protéger leur propre bien-être économique mais pas celui des membres.

[Bien qu’il y ait quelque chose de vrai dans cet argument étant donné le besoin des syndicats pour la démocratie et le contrôle des membres, la conséquence de couper le financement des syndicats en coupant la perception à la source serait dévastatrice.  Tant les locaux syndicaux que le personnel et les programmes de formation prendraient le bord. (Dan La Botz, The New American Workers Movement and the Confrontation to Come, site web de Solidarity, 28/02/11, traduction) de M. Bonhomme]

Cette contradiction a ulcéré de nombreux militants syndicaux qui sont frustrés que les fonctionnaires syndicaux n’ont pas pleinement contesté la demande de Walker que les travailleurs doivent faire des sacrifices pour aider à combler les déficits budgétaires de l’État.

(Elizabeth Schulte and Lee Sustar, Solidarity City, socialistworker.org, 28/02/11, traduction de M. Bonhomme)

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  1. […] Au printemps dernier, le Gouverneur Républicain de l’État du Wisconsin déposait un projet de loi visant à instaurer drastiquement l’équilibre budgétaire tout en s’attaquant directement au droit des employés de l’État à négocier collectivement leur condition de travail. S’en est suivit un important mouvement d’opposition ouvrière qui est venue briser la paix syndicale habituelle aux USA, comme on peut le lire dans ce billet de notre blogue. […]

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