La qualité chez Ericsson?

Coupes dans le contrôle de qualité

Tout au long de mon parcours au sein du département des Services accès de Red Bee Media / Ericsson, j’ai développé une certaine ardeur à produire des sous-titres de grande qualité pour tous les publics, quel que soit le contenu du programme ou la chaîne qui le diffuse. La même chose peut être dite de mes collègues. On pourrait croire que ce genre de fierté à offrir des services de grande qualité aux téléspectateur.rice.s malentendant.e.s serait partagée et même encouragée par la direction des opérations. À la place, j’ai pu observer des coupures récurrentes dans les programmes de contrôle de qualité, sacrifiés en faveur d’une hausse des bénéfices. La logique qui sous-tend ces pratiques veut que tout le travail investi dans la révision, la relecture et l’amélioration de nos activités pourrait être plus “productivement” employé dans la production d’une plus grande quantité de sous-titres. Inévitablement, les sous-titres en ressortent de moindre qualité. Les coupures sont particulièrement prononcées dans les bureaux d’Amérique du Nord, à Montréal (QC) et Duluth (GA), qui sont nouveaux dans le paysage et qui ont été ciblés par les objectifs de réduction des coûts d’opération globale mis en place par la direction.

Dans le cadre de leurs activités de sous-titrage et des tâches administratives qui leur sont associées, les sous-titreur.euse.s sont régulièrement confronté.e.s aux derniers restes d’une infrastructure de contrôle de la qualité aujourd’hui moribonde. Avant d’aborder la question de l’infrastructure-même, il est important de comprendre qu’en termes de précision, le sous-titrage en direct est un processus particulièrement imparfait. Les sous-titreur.euse.s doivent prendre des décisions éditoriales à la volée et un logiciel de reconnaissance vocal peut s’avérer un ami inconstant. Les sous-titres en direct peuvent être soit créés à partir de rien par les sous-titreur.euse.s (i.e. “répétition en direct”), soit produits à partir de textes préparés et fournis par le diffuseur, ou (dans le cas de contenu répété) ils peuvent être des retransmissions de texte créé à l’avance. À l’origine, chez Red Bee Media / Ericsson, lorsque le texte devait être retransmis de cette manière, il devait être relu après la première transmission afin de s’assurer que toutes les transmissions suivantes auraient une précision presque parfaite. Aujourd’hui, ce processus n’a plus lieu. Le résultat est que les mêmes erreurs se répètent d’une transmission à l’autre. Les tentatives de corriger les erreurs à la volée sont souvent empêchées par des problèmes techniques. Au fil des ans, une réduction similaire des processus de relecture s’est mise en place en ce qui concerne le sous-titrage des programmes préenregistrés.

Ignorer les demandes des employé-es

Lorsqu’on se prépare à sous-titrer un programme en direct, chaque minute est précieuse. Néanmoins, les sous-titreur.euse.s disposent souvent d’une copie remplie de fautes de frappe et d’orthographe. Parfois, il se retrouvent aussi avec une mise en page étrange qui doit être méticuleusement modifiée afin de créer des sous-titres conformes aux lignes directrices et au style du client. Au courant de la dernière année, le temps de préparation alloué aux programmes sous-titrés en direct a été presque unilatéralement coupé de moitié. La direction a à plusieurs reprises ignoré les demandes du personnel de sous-titrage et de formation d’augmenter ce temps de préparation pour certains programmes en direct. Celle-ci soutient que les travailleur.euse.s vont “s’adapter” aux nouvelles exigences, alors que même les sous-titreur.euse.s expérimenté.e.s peinent à accomplir le strict minimum en termes de travail de préparation.

Chez Red Bee Media / Ericsson, la principale mesure de contrôle qualité mise en place pour garantir l’exactitude des sous-titres en direct est l’examen détaillé du travail des sous-titreur.euse.s. Dans l’aile britannique des opérations, établie depuis longtemps, les sous-titreur.euse.s sont examiné.e.s trois fois par mois: une fois par eux.elles-mêmes, une fois par un.e pair.e, et une fois par le personnel de soutien. Au cours de la dernière année, la direction des opérations nord-américaines a éliminé les examens par les pair.e.s et les autos-examens, et a éliminé le système qui assurait qu’une grande variété du travail était révisée. Les sous-titreur.euse.s ne disposent par conséquent que de très peu d’informations sur les améliorations à apporter à leur travail.

Un problème de contrôle de qualité me semble particulièrement flagrant. Il s’agit du cas d’un.e employé.e daltonien.ne qui avait de la difficulté à coloriser du texte pour les émissions britanniques. Cet.te employé.e s’est fait dire à plusieurs reprises que des accommodements d’accessibilité ne seraient pas fournis aux travailleur.se.s parce que la coloration du texte n’est pas une haute priorité pour les diffuseurs. Il convient de noter que les téléspectateur.rice.s, et non les diffuseurs, sont les utilisateur.rice.s de sous-titres. Dans de nombreuses régions, les changements de couleur sont la seule méthode utilisée pour indiquer un changement de locuteur. Le.a téléspectateur.rice a le droit de s’attendre à ce que les sous-titreur.euse.s essaient au moins d’utiliser les couleurs avec précision. Dans ce cas, la direction de Red Bee Media / Ericsson échoue doublement: elle échoue face à ses téléspectateur.rice.s ainsi que face à ses employé.e.s. L’attitude blasée de la direction des Services d’accès envers ses responsabilités en matière d’accessibilité à l’égard de ses propres employé.e.s donne une idée troublante de son attitude à l’égard des services d’accessibilité en général.

Désintérêt pour de possibles améliorations

Ces coupures, de même que la suppression d’un bulletin informant les travailleur.euse.s sur le secteur des services d’accès en général, soulignent le désintérêt de la direction à fournir des services d’accès de haute qualité à ses clients. La direction de Red Bee Media  et des services d’accès d’Ericsson a clairement indiqué que beaucoup des diffuseurs pour lesquels nous produisons des sous-titres ne se soucient pas de la qualité des sous-titres, et ont souvent utilisé ce raisonnement pour justifier les décisions visant à réduire ou éliminer les mesures de contrôle de qualité mentionnées plus haut. Le mépris de la direction de Red Bee Media / Ericsson pour les téléspectateur.rice.s qui utilisent son produit est clair.

Lorsque les travailleur.euse.s sont informé.e.s que l’amélioration de leur travail est une perte de temps, il y a quelque chose qui cloche – lorsque les téléspectateur.rice.s dans les communautés sourdes et malentendantes sont lésé.e.s par une priorité placée sur les profits aux dépens des individus, la blessure est doublement honteuse.

 

Le syndicat des sous-titreuses et des sous-titreurs de Montréal cherche actuellement à négocier sa première convention collective avec Red Bee Media / Ericsson, une entreprise qui a refusé de négocier à compter du 21 mars 2018. Les travailleur.euse.s demandent des salaires équitables et des pauses fondées sur les opérations globales, et la fin du modèle des quarts de travail exténuants présentement en place.

 

Solidarité,

Le syndicat des sous-titreuses et des sous-titreurs de Montréal.

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  1. […] qui produit des sous-titres destinés à la télédiffusion au Canada et au Royaume-Uni, ont vu la qualité de leur travail se dégrader tout comme leurs conditions de […]

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