Comment résister aux lois spéciales de retour au travail
Les travailleurs.ses des postes au Canada ont éffectué.e.s des grèves rotatives au début de l’hiver 2018 quand, suite à une loi spéciale du Gouvernement Fédéral, ils et elles ont été forcés de retourner au travail. Depuis, les négociations ont été sujettes à de l’arbitrage, qui a mené à deux prolongations. Les travailleurs.ses des postes avaient aussi été soumis à une loi semblable en 2011, sous un article qui a été ensuite prouvé être anticonstitutionnel par la Cours Suprême du Canada. Pourtant, cette jurisprudence n’a pas su empêcher la grève de l’an dernier de se terminer de la même manière.
Les Travailleurs.ses font aujourd’hui face a toute sorte de législation impromptue qui vient interrompre leurs grèves, de l’article Taft Hartley aux États-Unis, qui prévient les grèves de soutien, à la Loi Taylor de l’état de New York, qui empêche carrément les travailleurs.ses de la fonction publique de déclencher une grève. Plusieurs ont avancé que les syndicats se doivent de défier ces lois afin de renverser la vapeur sur ces lois draconiennes et actualiser l’activisme syndical afin de lutter pour des gains réels dans les milieux de travail. Mais comment y arriver alors que les pénalités et frais d’entrave sont si élevés? Dans le cas de Postes Canada, certain.e.s travailleurs.ses sont sujets à des amendes de $1,000 par jour simplement pour avoir participé à la grève.
J’ai parlé avec Roland Schmidt, Président de la section locale 730 du syndicat des Postes à Edmonton. Les travailleurs.ses dans cette section ont établis une méthode de désobéissance aux lois de retour-au-travail forcé et luttent contre l’instauration de nouvelles lois du même genre. Ces actions directes commencent en bâtissant un rapport de force dans leur milieu de travail pour ensuite se disperser dans un programme de formation plus large.
Comment est-ce que ces actions directes, dans votre milieu de travail, ont-elles commencées?
En 2011, notre division locale a eu une expérience d’organisation très positive auprès de plusieurs militant.e.s qui se sont battus.e.s contre un régime d’heures supplémentaires obligatoires. Tangiblement, cela signifiait que si nous étions à court de personnel, la corporation pouvait forcer facteurs et factrices à demeurer au travail. Au lieu d’engager le personnel nécessaire, les boss pouvaient donc utiliser ces mesures pour forcer les employé.e.s à demeurer au travail jusqu’à ce que les tâches soient terminées. Nous avons appelé cette mesure ‘force back’. Des travailleurs.ses auraient terminé.e.s leur route habituelle, et ensuite devaient enchaîner avec une autre heure et quarante-cinq minutes supplémentaires, soit la route d’une autre personne. Si cela arrivait une fois ou deux en quelques mois, d’accord, nous aurions simplement gagné un peu plus d’argent. Mais là, cette exception à la règle arrivait trois fois par semaine. Lutter contre cette mesure a été un réel tremplin pour le militantisme dans la section locale. Des comités de travail de terrain sont apparus, ont coordonnés des refus d’application du règlement et se sont tenus les coudes face à la corporation. Une campagne a émergé dans l’ensemble de la ville, regroupant tous les fournisseurs de toutes les stations. Nous avons organisé des réunions de masses. Poste Canada s’est rétracté quant aux menaces de suspensions et a changé ses méthodes d’organisation de ses employé.e.s et le problème était réglé!
Fort de notre expérience, nous avons développé un cours intitulé ‘’Taking back the workfloor’’ (Se réapproprier son milieu de travail) qui s’inspirait grandement des formations données par les IWW (Industrial Workers of the World), une organization syndicale qui a toujours été réactive dans son support au syndicat des postes lorsque nos droits se font bafoués.
Ironiquement, dans la même période de temps ou nous étions en train d’entrer dans le déclenchement d’une grève, (le Premier Ministre Stephen) Harper nous a balancé une loi spéciale de retour au travail. Cette législation a vraiment dégonflé nos troupes. Nous n’avions pas de plan d’action pour se battre contre la loi. Suite à cet événement, notre section est entrée dans une grande période d’inactivité qui ne s’est terminée que récemment, dans les derniers 6 ou 8 mois.
Il y a encore beaucoup de réticences et d’inquiétudes qui n’ont pas été adressées – nous avons encore des enjeux autour de structures au travail et de manque de personnel qui résultent en blessures sur le quart de nos membres chaque année. Suite à la loi de l’année dernière, nos membres ont été poussé.e.s à bout, résultant en un abandon du processus syndical habituel. J’ai fait partie d’un petit groupe de militant.e.s à Edmonton et nous avons décidé que nous devions ouvertement assumer que toutes les procédures syndicales – griefs, arbitrage, le système judiciaire, la constitution – nous ont laissé tomber. Nous devons retourner nous battre pour faire revivre le militantisme de CUPW.
J’étais officier à l’organisation à l’époque, et nous avons ressorti ce cours pour former des gens au travers de ces enjeux. Notre groupe s’est élargi, de 5 personne à 30. Nous avons finalement décidé de se lancer complètement, et je suis devenu président de notre section locale en Juin (2018). Nous reconnaissons complètement les limites liées à la bureaucratie syndicale, mais nous nous sommes dit que nous pourrions utiliser cette plateforme comme levier pour promouvoir une campagne d’organisation chez l’ensemble des travailleur.se.s des Postes. Puisque je ne suis plus facteur, je passe le plus clair de mon temps au bureau du Syndicat et je peux ainsi passer la moitié de mes journées en visite dans différents bâtiments de Postes Canada afin d’expliquer pourquoi le syndicat passe son temps à perdre ses combats, pourquoi nous recevons toujours des lois briseuses de grève et pourquoi l’organisation syndicale est la meilleure manière de contrer ces mesures. Ensemble nous pouvons renverser la vapeur et mettre de la pression sur la compagnie. Je n’étais pas certain de la réaction des travailleurs.ses face à mes idées mais, avec l’aide d’autres militant.e.s, les gens se sont enrôlés en masse et nous avons remplis notre salle de cours 6 fois en Juin, avec 20 personnes à chaque fois. Cette masse de gens représente le noyau de notre nouveau contingent d’organisateurs.trices et nous avions maintenant des représentants.tes dans chaque secteur de l’entreprise.
Nous avons eu plusieurs actions directes dans sept de nos onzes principaux lieux de travail, impliquant ainsi de nouveaux.elles travailleurs.ses dans des actions directes; confronter des patrons intimidants, adresser des problèmes de paies etc. Avec l’action directe, nous avons pu voir une amélioration majeure de nos conditions de travail en quelques semaines, alors que nous n’avions vu aucun changement en plusieurs années.
Avez-vous peur des pénalités, suite à toutes ces actions directes, considérant que vous êtes souscrits aux lois de retour-au-travail?
C’est une inquiétude très présente. Quelques personnes croient que ce n’est pas vraiment important de considérer les amendes, mais la réalité est qu’auprès de la majorité de nos membres, c’est un enjeux à ne pas prendre à la légère.
Beaucoup de nos actions ont lieu autour du fait que notre convention collective nous donne le droit de se plaindre. Disons que tu as un patron qui fait de l’intimidation – comme la semaine dernière, il y avait une section de 25 travailleurs.ses dans un site qui ont été aux prises avec un superviseur harcelant qui leur tombait systématiquement sur la tête. Il ne laissait pas les gens partir avant l’ultime dernière minute, ce qui est largement mal reçu puisqu’il faut mettre au moins 5 minutes pour traverser l’immense shoppe. Ils et elles se sont tanné de remplir des griefs à l’égard de ce superviseur et 20 des 25 travailleurs.ses ont marché jusqu’au bureau du Directeur pour le sommer de les écouter. Ce dernier a quitté les lieux et les travailleurs.ses lui ont dit ‘’On va t’attendre jusqu’à ce que tu reviennes’’. Il est éventuellement revenu et ils et elles ont pu lui expliquer tous leurs problèmes avec le Superviseur en question. Le directeur l’a ensuite réprimandé et le superviseur a même présenté des excuses aux travailleurs.ses. Depuis, il semble se tenir plus droit et agir avec plus respectueusement.
La compagnie a ensuite délivré des lettres disciplinaires à tous.tes les travailleurs.ses sous le prétexte qu’ils et elles avaient stoppé la production pour une demi heure. Nous nous sommes battu.e.s contre cette mesure disciplinaire. Dans le cadre de mes fonctions de président, j’ai dit: ‘’Nous avons fait usage de notre droit de nous plaindre. Le directeur a fuit son bureau, allongeant ainsi une rencontre qui aurait pu durer seulement qu’une minute’’ Même si nous avons stoppé la production, pourquoi ne nous ont-ils pas ressorti la loi ? Il y a eu plusieurs reprises ou ils auraient pu nous la remettre en plein visage, mais je pense que les patrons ont peurs de mettre de l’huile sur le feu.
À Rosedale, une des plus grande centrales de tri du courrier à Edmonton, il y a eu une erreur dans la catégorisation d’un certain flyer, les patrons ont donc insisté qu’on le délivre individuellement chez tout le monde. Cette demande ajoutait jusqu’à 4 kilomètres additionnels de marche aux facteurs.trices déjà surmené.e.s. J’étais encore facteur à cette époque et nous avons effectué un march on the Boss en disant ‘’ Vous devez re-classifier ce flyer’’. La direction de cette station a ensuite ordonné que l’on délivre tout de même le flyer. Plutôt que d’obtempérer, les travailleurs.ses sont passés.e.s au vote sur le sujet et ont voté non. Alors, le direction leur a dit ‘’Nous allons devoir effectuer des mesures disciplinaires’’ mais nous lui avons tous et toutes ris au visage. Des 60 personnes qui ont refusé de distribuer le flyer, seulement 5 ont été ciblé.e.s et ont reçu une suspension d’un jour. Normalement, nous aurions reçu une suspension de 5 jours pour une telle action d’insubordination flagrante. Considérant que nous avions reçu par deux fois un ordre direct et avons quand même refusé d’obéir.
Cet incident aurait été une autre opportunité d’utiliser la Loi spéciale contre nous que le patronat n’a pas saisi. Pourquoi ne l’ont-ils pas fait et pourquoi ne sont-ils pas plus sévères sur les travailleurs.ses qui ont participé? On pense que ça n’en prend pas gros pour leur faire peur.
En quoi consiste le cours Take Back the WorkFloor ?
La formule AEIOU (Agiter, Éduquer, Inoculer, Organiser, Unité) apprend aux travailleurs.ses à se bâtir une équipe de support dans leur milieu de travail. Effectuer la cartographie du milieu de travail augmente souvent le registre des allié.es potentiel.les. Comment organiser une réunion de collègues. Nous faisons aussi beaucoup de jeux de rôles et simulations de réunion et de confrontations potentielles – tout cela dans une journée de 8 heures.
Nous essayons de convaincre le plus de personnes possible puisque nous voulons recruter plus largement qu’auprès des personnes déjà idéologiquement convaincues. Nous inscrivons des personnes selon leurs horaires de travail. Ils et elles participent avec d’autres collègues qui partagent le même genre de tâches et le même rang. Ensuite, nous leur demandons s’ils et elles aimeraient poursuivre leur implication syndicale, et les reléguons ensuite à des groupes Facebook, Signal ainsi que la liste courriel.
Nous avons eu tellement de succès que tous les différents niveaux de notre syndicat ont été enthousiasmés à l’idée de suivre notre cours. Nous faisons partie de la région des prairies – Alberta, Saskatchewan et Manitoba – et le reste de la région semble inspirée à se joindre à l’effort tel que lancé à Edmonton. D’autres locaux nous demandent pourquoi un tel programme n’existe pas chez elles et eux. Nous partageons donc nos méthodes organisationnelles avec d’autres sections locales – Lethbridge, Grande Prairie Saskatoon, Winnipeg. Ainsi, nous envoyons donc nos formateurs.trices dans les différents locaux pour donner le cours mais aussi pour former d’autres travailleurs.ses pour qu’ils et elles puissent ensuite être autonome. Nous les aidons à prendre leur air d’allée pour qu’ensuite leur local se gère par lui-même. Avec ces différents locaux nous pouvons même créer des comités d’organisation régionale – une première pour notre syndicat!
Comment a réagit le CUPW National, a-t-il même réagit?
C’est dur à dire. Pour ce qui est de l’organisation syndicale en tant que telle, c’est intéressant parce que nous faisons face à un succès jamais vu auparavant. Nous avons presque triplé nos niveaux de participation aux Rencontres Mensuelles, résultant de l’immense participation aux comités d’organisation, aux groupes de volontaires, à tous ceux et celles qui partagent nos progrès sur les réseaux sociaux. Toutes ces choses qui font réagir des personnes sur notre page Facebook où des groupes d’au travers le pays commencent à se questionner sur ‘’pourquoi est-ce que ce genre d’activité n’émerge pas ailleurs?’’
C’est difficile de déterminer si ces personnes, au national, sont aussi sceptiques parce qu’elles n’ont pas initié le mouvement et sont maintenant gênées , en quelque sorte, de s’y rallier aussi tardivement, ou si c’est parce qu’elles sont carrément opposées à nos méthodes. J’aime comparer le syndicalisme à un oiseau. Une aile n’est que procédures; mettre les barres sur les T, gérer des griefs, l’arbitrage, les consultations etc. L’autre aile représente l’Organisation de terrain. Notre syndicat ne s’est appuyé que principalement sur son aile procédurale depuis 1985. C’est à ce moment là que les pénalités et amendes attribuées aux grévistes sont passées de pénalités carcérales aux lois de retour-au-travail que nous connaissons aujourd’hui. Ensuite, la stratégie à changé en fonction de la réflexion suivante : ‘’Nous sommes les spécialistes dans notre domaine, c’est nous qui allons avoir de bien meilleurs témoignages pour l’arbitrage’’. L’idée n’était probablement pas de démobiliser les travailleurs.ses, mais cet entrain à mettre l’emphase sur la procédure est venue au dépit de la solidarité collective. Le danger est qu’une fois que nous sommes habitué.e.s de concevoir le syndicalisme de cette façon, il devient difficile de croire qu’il peut exister de toute autre manière. Je n’ai pas envie de prêter des intentions malicieuses aux syndicalistes procéduraux, mais je crois que nous pouvons puiser notre force collective en acceptant qu’il y a plusieurs visions et approches qui méritent d’être prises en considération. Je comprend que quelqu’un qui a passé l’entièreté de sa carrière à remplir des griefs pourrait se sentir menacé par des membres friands d’une autre stratégie.
J’ai vu que vous avez décidé de sonder vos membres par rapport à la question du respect de la loi de retour au travail. Pourquoi avez vous décidé de procéder ainsi et quel a été le résultat de ce sondage?
C’est intéressant parce que pendant que nous étions en planification de campagne et offrons des formations syndicales à nos membres, ils et elles regardaient déjà la situation en se demandant ‘’Comment est-ce qu’on va se battre contre ça’’.
Les routes d’un département étaient en train d’être réévaluées. C’est une pratique qui survient chaque 4 ou 5 ans, en fonction du nombre de paquets et de lettres. Même si le nombre de lettres ne cesse de diminuer, la quantité de paquets, elle, augmente plus vite, créant ainsi plus de travail pour nos membres. Notre convention collective n’a pas de clause claire par rapport à ces évaluations de nos routes et n’exige pas de l’employeur de nous fournir des nombres exacts. Ces chiffres, fournis par des observateurs du syndicat, sont envoyés à Postes Canada, qui les ajoute à ses algorithmes et sont ensuite mélangés et tordus d’une manière incompréhensible. Nous leur avons demandé de nous montrer leurs calculs, mais leur réponse à toujours été : ‘’Si vous n’êtes pas content.e.s, remplissez des griefs’’. En guise de réponse, nous avons fait circuler une pétition dans toute la ville par presque chaque facteur.trice, 800 personnes, en demandant les chiffres exacts et la création de 3 nouveaux postes ; des demandes basées sur les calculs de nos propres chiffres. Nous avons menacé le CEO de Postes Canada d’une escalade des moyens de pressions si P.C ne répondait pas à nos demandes. À la base ils allaient couper 8 postes, mais n’en ont finalement coupé que 3. Nous avons donc réussi à préserver 5 postes grâce à notre organisation – bien que toute coupure est, selon nous inacceptable.
Une rencontre de masse à été organisée où 120 travailleurs.ses sont venu.e.s supporter les travailleurs.ses de ce département en disant ‘’Comment allons-nous augmenter la pression, tout en étant souscrit aux lois de retour-au-travail qui nous font risquer des amendes de $1000 par jour?’’ Puisque personne n’a les moyens de payer de telles amendes, nous nous sommes demandés ‘’Avons nous suffisamment de support pour se battre de manière à ce que les amendes ne soient pas exécutables? ‘’ Et nous avons décidé collectivement que nous n’avions pas les effectifs pour escalader les moyens de pression. C’était trop gros pour nous, à ce moment là ; nous avions besoin de plus de support.
On m’a demandé d’organiser un référendum en Octobre. Je suis donc allé dans toutes nos succursales d’Edmonton avec des boîtes et des ballots de vote, une courte présentation sur nos conditions de travail, la loi de retour-au-travail ainsi que plein d’exemples de moments où nos droits n’ont pas, et ne sont pas, pris au sérieux par l’employeur. J’ai aussi insisté sur le fait qu’il n’y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse – au cas où les travailleurs ne voudraient pas désobéir à la loi. Après tout, on souhaite une solution réaliste, pas idéaliste. Le résultat du vote, au travers de la ville, à été en faveur de la désobéissance à la loi de retour-au-travail à 83%. Cependant, cette désobéissance était conditionnelle au support de l’ensemble du local, en plus du national.
Ensuite, j’ai rédigé une lettre ouverte au nom du local, “Nous devons nous sortir de ce cycle sans fin de loi de retour-au-travail’’ et nous avons insisté sur le fait que rien ne nous différencie des autres facteurs et factrices du pays, ici à Edmonton. Si quelqu’un allait poser ces mêmes questions à la grandeur de Poste Canada, nos collègues seraient probablement du même avis que nous. Ainsi, le national nous a donc aidé à étendre notre référendum à l’extérieur d’Edmonton.
Nous avons eu notre premier appel avec le syndical national au début de Novembre puis un second la semaine dernière. À leur défense, ils ont été honnêtes de prime abord sur le fait qu’ils ne pouvaient pas vraiment supporter des mesures de désobéissance des lois briseuses de grève. Je ne vois rien de mal sur le fait d’être honnête par rapport à ca. Si nous avions $20 millions, la moitié de nos membres auraient pu défier la loi pour seulement une journée ; et ce n’est vraiment pas assez. Mais l’idée à toujours été que si nous voulions avoir du succès dans notre compagne, ce n’est pas parce que certain.e.s d’entre nous peuvent éponger les amendes, mais bien parce que nous aurions un si grand effectif que ces amendes ne pourraient jamais possiblement être mises en oeuvre.
Le national n’avait pas les ressources financières pour nous appuyer, et n’était pas prêt à faire des sorties publiques en faveur de la désobéissance aux lois, mais a été très encourageant et présent pour notre campagne. Ils se sont donc très élégamment sortis de l’idée du référendum.
Par contre, si tu veux faire de la désobéissance civile, ce n’est pas nécessairement en passant par le national et en attendant d’avoir la permission que tu vas réussir. C’est plutôt sur le terrain des vaches, dans les shoppes que ce genre de chose va escalader. Une bonne façon de l’envisager est de gérer ses problèmes locaux, ensuite régionaux puis éventuellement ce sera plus facile d’avoir ce genre de conversation au niveau national.
Même si le national n’est pas emballé à l’idée de notre défiance, au moins il ne porte pas entrave à notre campagne. Pour quiconque a déjà eu à dealer avec des grosses centrales syndicales, cela représente déjà une victoire. C’est souvent nos propres organisations qui limitent notre potentiel.
Comment planifiez-vous étendre votre approche?
Nous savons que d’autres niveaux du syndicat – régional, national- ne vont pas se lancer dans un tel programme sans avoir plus qu’assez de preuve. Alors à Edmonton, nous nous sommes simplement concentré.e.s sur le processus. On continue de planter des graines et espérer que quelque chose prenne racine. Si tu donnes les bons outils aux travailleurs.ses dont les droits se font bâcler, c’est inévitable qu’ils et elles vont s’en servir. En plus, la rumeur sur nos succès commence à se répandre. Les réseaux sociaux nous ont beaucoup aidé sur ce front.
J’ai aussi eu le plaisir de partager nos histoires dans un forum éducatif où j’ai partagé que Edmonton serait prêt à partager ses outils et même envoyer des formateurs.trices à quiconque serait intéressé. Immédiatement, nous avons eu plusieurs réponses de la part d’autres locaux et nous allons leur prêter main forte dans la nouvelle année. Si des sections éloignées déboursent les frais, nous pouvons même envoyer nos formateurs.trices en avion pour former d’autres collègues et leur permettre rapidement de s’organiser indépendamment. Nous pensons que toutes ces actions de terrain un peu partout dans d’autres sections locales inspireront les régions à s’y joindre aussi.
C’est impossible d’avoir trop de formateurs et de formatrices. Je vais continuer à promouvoir mon cours tant qu’il y aura une demande. Si les actions syndicales se multiplient, le stigmat autour de ces méthodes diminuera sûrement et plus de travailleurs.ses s’y prêteront. Le plus longtemps nous continuons la construction de ce modèle d’organisation, le mieux préparé nous serons pour le futur et ce peu importe la situation, que ce soit des lois ou des conditions de travail indécentes. Parce que c’est en fait ce qui nous attends. C’est la suite logique de toute l’histoire de la classe ouvrière. Alors nous devons maintenir notre cap sur l’organisation. La désobéissance aux lois de retour-au-travail est la seule façon de pousser le mouvement syndical dans la bonne direction et éviter que les choses s’empirent.
Si ce n’est qu’un département à Edmonton, ils vont vous tomber dessus à toute vitesse. Mais toute la ville? Une des choses sur lesquelles j’insiste dans ma présentation pour le référendum est l’organisation syndicale comme départ de tout mouvement de contestation. C’est inévitable. Et ces travailleurs.ses vont commencer quelque chose de magnifique. Mais c’est une chose que d’y rêver, et une autre que de s’organiser en conséquence.
Article Original de Organizing Work
Traduit de l’Anglais par Elizabeth Stone
Mars 2020
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