Pourquoi former un syndicat même si t’as une job de rêve ?

J’ai une bonne job, vraiment ! Elle rendrait jaloux beaucoup de gens et je le sais. J’y fais un très bon salaire, j’y ai un horaire qui me convient et des patrons très humains et soucieux de respecter leurs employé.es et que les employé.es se respectent entre elles et eux. Sans farces, ce n’est pas une parade de bullshit ! Mes journées passent rapidement; je me sens stimulé, j’ai des défis à relever, des possibilités d’avancement, des moments «relax» qui font que je ne suis pas trop stressé non plus, je n’ai pas de travail à rapporter à la maison et, la cerise sur le gâteau, je ne suis ni patron ni cadre ! Tout ça avec un DEP.

J’ai vraiment une bonne job, et je ne suis pas le seul.

En effet, la tendance des dernières années à rendre le travail cool et bien payé pour mettre la main sur les employé.es à cause de la pénurie de main d’oeuvre a rapporté gros à beaucoup d’entre nous, dont moi, et cela que nous soyons dans un milieu syndiqué ou non. Pourtant, je suis quand même convaincu qu’il faut que mes collègues et moi on se syndique à l’IWW. Je suis aussi convaincu que le capitalisme n’apporte rien de bon à ma vie, même si je fais partie des personnes qui sont «relativement» privilégiées à l’intérieur de celui-ci. Finalement, je suis convaincu d’une troisième chose : c’est que trop peu de personnes pensent comme moi et qu’il s’agit d’une bombe à retardement. Pourquoi ? Et bien laissez-moi vous l’expliquer en quelques points !

  1. Mes collègues

Si ma job est une job de rêve, ce n’est malheureusement pas le cas pour tou.tes mes collègues. Je ne peux évidemment pas me contenter de me dire que si les choses vont bien pour moi, tant pis pour les autres et qu’ils et elles n’ont qu’à se débrouiller pour améliorer leur sort. Ils et elles ont les mêmes besoins que moi, peu importe leurs études, leurs compétences et leur rendement au travail. Il faut donc que tous et toutes aient assez à la fin du mois pour vivre convenablement.

2. La «plus-value» qu’on nous vole

La «plus-value», pour l’expliquer grossièrement, correspond à la part de la valeur du travail qu’on accomplit que nos patrons et l’entreprise gardent pour eux. Très simplement, c’est le profit de l’entreprise et une bonne partie du salaire des patrons, et cet argent vient de NOTRE travail; pas du leur !

Ceci étant dit, nous avons appris il y a quelques mois que l’entreprise pour laquelle je travaille a fait des profits équivalent à près de 25% du salaire moyen de ses employé.es cette année, et cela malgré de très gros investissements. Peu importe que nous soyons déjà bien payé.es, nous savons que nous nous faisons encore dérober en toute légalité près de 25% de la valeur de notre travail ! Nous subissons donc malgré tout une énorme injustice basée uniquement sur le fait que mon patron était le fils de son père et a ainsi hérité de l’entreprise familiale. Ce vol légal et le système qui le permet (le capitalisme) doivent cesser.

Transformer mon milieu de travail en coopérative nous permettrait de mettre la main sur cet argent et de l’utiliser soit pour nous, soit pour aider notre communauté (qui, dans le quartier ou je travaille, en aurait grandement besoin, croyez-moi !)

3. Les «beaux jours» ne seront pas éternels

Si les choses vont bien pour moi et la plupart de mes collègues en ce moment (et cela sans même que nous n’ayons eu à former un syndicat, je le rappelle), ce n’est pas parce que nous sommes meilleur.es que les autres : C’est uniquement une question de contexte !

En effet, les périodes de pénurie de main d’oeuvre ET de prospérité économique ne sont pas la norme et ne durent pas éternellement. L’entreprise pour laquelle je travaille est en ce moment dans un créneau bien précis qui lui permet de faire des affaires d’or aujourd’hui; mais qu’en sera-t-il dans cinq ou dix ans ? Si la pénurie de main d’oeuvre cesse et que le chômage monte en flèche, quel intérêt notre employeur aura-t-il à sortir tambours et trompettes pour nous attirer et nous retenir ? Aucun. Et si nous n’avons pas formé de syndicat d’ici là, comment allons-nous défendre nos acquis ? Nous ne pourrons tout simplement pas.

Et si le syndicalisme de solidarité m’a appris quelque chose, c’est que c’est lorsque tout va bien qu’il faut se préparer à la tempête, pas lorsqu’on est en plein dedans. Il faut donc impérativement que les personnes qui sont dans une situation semblable à la mienne comprennent cela : Nous n’avons rien de spécial; nous n’avons que de la chance et cette chance ne sera pas éternelle. Soyons des fourmis; pas des cigales !

4. La foutue croissance infinie

Je suis devenu un anticapitaliste il y a une dizaine d’année lorsque j’ai compris que :

a) La croissance infinie sur une planète aux ressources finies = l’épuisement inévitable des ressources et l’auto-extinction.

b) Le capitalisme n’a pas le choix de croître pour survivre.

Donc, peu importe à quel point on réformera le capitalisme pour le rendre plus «juste» et «vert», ce problème persistera puisqu’il est au coeur de son fonctionnement. Sans entrer dans les détails du pourquoi (parce que ce n’est pas le but de ce texte), l’essentiel à retenir est que le syndicalisme révolutionnaire de l’IWW n’est, pour moi, pas qu’une affaire de justice sociale et économique; c’est un acte nécessaire pour mettre fin au capitalisme et assurer la survie de notre espèce et de bien d’autres !

Étrangement, ce point est peut-être paradoxalement le plus négligé et le plus important de tous. Je peux cependant comprendre pourquoi, puisque «sauver la planète» n’est pas un besoin immédiat, contrairement à gagner assez d’argent pour payer notre loyer ou à arriver à éliminer le sexisme et le racisme au travail. On se dit donc qu’on s’en occupera plus tard. Oui, mais… cependant, il ne faut pas l’oublier non plus, car plus nous mettrons de temps à sortir du capitalisme, plus nous devrons reconstruire sur des dépotoirs, cultiver des sols morts et arides, et plus nous aurons perdu à jamais d’espèces animales et végétales essentielles à notre survie. C’est bien beau que moi et mes collègues on fasse 70 000 $/an, mais si on se couche le soir en se disant que nos enfants n’auront plus rien à manger dans 40 ans, est-ce qu’on est vraiment heureux et heureuses ? Bien sûr que non. 

C’est pour ça qu’il faut mettre mes patrons ainsi que tous les patrons du monde à la porte, pour créer une économie raisonnable, basée sur les ressources et respectueuse de l’environnement. C’est une question de survie !

En résumé

Même si on a d’excellentes job, former des syndicats (spécialement s’ils sont révolutionnaires) et lutter est une nécessité. C’est une nécessité, parce que nos collègues ont besoin de nous, parce que nos patrons nous volent quand même beaucoup d’argent, parce que les syndicats nous préparent pour les jours difficiles et parce qu’ils nous permettront peut-être d’éviter notre auto-extinction.

Donc, si comme moi, t’as une bonne job, formes-y quand même un syndicat ! Parce que contrairement à ce que te dirais Pierre-Yves McSween : T’en as vraiment besoin !

Pour nous contacter :
Courriel du SITT-IWW Montréal
Facebook

Auteur anonyme

0 réponses

Répondre

Want to join the discussion?
Feel free to contribute!

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *