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Série sur l’immigration, chapitre 1 : Grandeur et misère du chemin Roxham

Je l’avoue, j’ai une passion pour les sports extrêmes. J’aime le kayak d’eau vive, j’ai trippé quand j’ai essayé le kitesurf et j’attends juste de finir mes études pour avoir assez de temps pour me consacrer au roller derby. Mais décidément, le sport extrême qui me fait vivre le plus d’émotions fortes, c’est la course absolument infinie pour trouver son chemin à travers le labyrinthe en constante reconstruction qu’est notre système d’immigration. Vous n’allez surement pas me croire, mais je vous jure que c’est vraiment excitant!

Comme les politiques d’immigration canadiennes sont un casse-tête pour absolument tout le monde, incluant moi-même, j’ai décidé de faire une série d’articles visant à vulgariser tout ça. Si tout se passe comme prévu – mais s’il vous plait, faites-vous pas trop d’attentes – j’ai espoir de finir un texte sur les statuts d’immigration temporaires et la traite de personne et d’en pondre un autre sur l’historique des politiques migratoires racistes depuis la confédération. Je suis aussi ouverte aux suggestions. J’aime les défis et je suis un brin orgueilleuse, bring it ta question piège!

Bref, on part ça en force avec un sujet beaucoup trop brulant d’actualité pour que mon texte demeure à jour bien bien longtemps, et j’ai nommé : l’entente sur les tiers pays surs et le chemin Roxham.

En espérant que ça vous aide à mieux comprendre les enjeux!

Quelques notions de base en guise d’introduction

  1. Personne n’est illégal. Jamais.

Les gens sont parfois sans statut ou sans papiers. Ils n’ont parfois pas les bons papiers, mais ils ne sont jamais « illégaux », parce que ne pas être en situation irrégulière par rapport à son statut d’immigration c’est une infraction de nature administrative, pas criminelle. Exactement comme un ticket de parking. Par contre, c’est une infraction criminelle d’embaucher des personnes qui n’ont pas de permis de travail. Ça peut parfois même être vu sous l’angle du trafic humain dans certaines circonstances. On verra ça plus en détail dans la prochaine édition!

  1. Extrêmement rares sont les personnes qui arrivent au Canada sans papiers.

Cela s’explique en partie par la situation géographique du pays. En effet, à moins de passer par les États-Unis, seule frontière terrestre avec le Canada, il faut absolument prendre un bateau ou un avion pour venir au pays. Or, à moins de venir dans un conteneur à bord d’un cargo – on parle d’une vingtaine de personnes par année au cours des 5 dernières années1 – il faudra minimalement un passeport et un visa (de travail, d’étude ou de tourisme)2 pour pouvoir monter dans ces transports et finalement entrer au pays.

Les personnes qui sont sans statut au Canada ont à très, très vaste majorité déjà eu une autorisation légale pour être ici et l’ont perdue en cours de route. Cela vaut également pour les personnes qui traversent la frontière à pied depuis les États-Unis. C’est mon prochain point.

Le chemin Roxham, un spectre qui hante les conservateurs

Le chemin Roxham qui, dans une autre vie, rêvait d’être reconnu à la grandeur du pays pour être la porte d’entrée de l’incomparable Parc Safari, est aujourd’hui plutôt réputé pour être la principale porte d’entrée vers le Canada ou les États-Unis – dépendamment par quel sens on l’emprunte3 – pour des migrant-es en quête d’une vie plus stable.

En effet, en dépassant ledit parc, le chemin Roxham se rétrécit en une sorte de route de campagne entourée de maisons éloignées les unes des autres séparées par des champs et des parcelles de forêt. Le chemin se poursuit de la même façon du côté états-unien avant de redevenir une route plus passante quelques kilomètres plus loin. À la limite entre le Canada et les États-Unis : rien. Pas de poste frontalier officiel, seulement un poste de commandement de la GRC et une butte qui semble être artificiellement construite pour délimiter la frontière.


Poste de la GRC Source : Google Map, 26 janvier 2023


Fin du chemin Roxham du côté canadien. Source : Google Map, 26 janvier 2023

Ce point de passage est de loin le plus populaire chez les migrant-es, d’abord et avant tout pour des considérations pratiques. En effet, rares sont les zones frontalières non contrôlées par des douaniers qui sont traversés par une route quasiment complète. Pour traverser ailleurs sans faire face à un douanier, il faut marcher sur plusieurs kilomètres sans repères dans la forêt, ce qui augmente le risque de se perdre en cours de route.

Maintenant, pourquoi des personnes veulent éviter de passer par les douanes? Contrairement aux messages bombardés par la droite anti-immigration, ce n’est pas parce que ces personnes ont davantage de « choses à cacher » que les autres.

Pour bien comprendre l’origine de la popularité du chemin Roxham, il faut remonter à la très gênante époque de la War on terror décrétée par les États-Unis au lendemain des attentats du 11 septembre 2001. Faisant du pouce sur la rumeur voulant que les assaillants des tours jumelles aient rejoint les États-Unis par la frontière canadienne – mythe qui sera ensuite démantelé – les républicains de George W. Bush militent pour l’augmentation du contrôle aux frontières. On estimait alors que la frontière canadienne était une passoire pour des ressortissant-es étranger-ères à la recherche de travail aux États-Unis.

Dans ce contexte, le Canada et les États-Unis ont signé l’Accord entre le Gouvernement du Canada et le Gouvernement des États-Unis d’Amérique pour la coopération en matière d’examen des demandes de statut de réfugiés présentées par des ressortissants de pays tiers4 souvent appelée simplement « entente sur les tiers pays sûrs ».

Ne soyez pas surpris-es, cette entente mise, entre autres choses, sur le principe déjà bien connu à ce moment en Europe de… « Tiers pays sûr ». En gros, ce principe établit la responsabilité face au traitement des demandes d’asile pour le premier État jugé sécuritaire qui aurait été traversé par les ressortissant-es étranger-es lors de leur parcours migratoire.

Par exemple, une personne en provenance d’Amérique latine qui aurait visité les États-Unis, puis traversé au Canada avant de demander l’asile, serait automatiquement refusée et renvoyée vers les États-Unis pour le traitement de sa demande.

La twist, c’est que l’entente prévoit une exception à cette obligation pour les personnes qui traverseraient la frontière à pied sans croiser de poste frontalier. Donc si on reprend l’exemple précédent, la personne en provenance d’Amérique latine pourrait voir son dossier d’asile traité au Canada si elle passe par… Le chemin Roxham!

En passant par cette route, les migrant-es savent qu’ils ne rencontreront pas de douaniers, mais ils savent aussi que des agents de la GRC seront de l’autre côté pour accueillir leur demande d’asile dès les premières minutes de leur séjour au Canada. Raison pour laquelle les personnes qui traversent par-là ne doivent pas être qualifié-es de « sans-papiers ».

Ce sont des demandeurs d’asile.

Jusqu’à l’entente Biden-Trudeau de mars 2023, les agent-es de la GRC qui étaient envoyés dans cette zone n’avaient pas le mandat de déterminer si les personnes qui traversaient avaient des motifs valables de demander la protection du Canada. Ils n’avaient pas non plus le droit de renvoyer les gens vers les États-Unis. Ils devaient donc transporter les migrant-es vers ce qu’ils appellent le « Centre de surveillance de l’immigration » de Laval, lire : une prison fraîchement agrandie. Mais ne vous inquiétez pas, sur le site de l’Agence des services frontaliers du Canada on nous assure que les salles à manger de la prison de Laval sont des espaces règne la lumière naturelle5. #Canada, #PaysDesDroitsHumains, #MonCul.

De la prison, l’identité des demandeur-euses sera vérifiée. S’ils et elles ne sont pas des criminel-les notoires dans leurs pays d’origine, ils et elles seront relâchés au bout de quelque temps avec un statut temporaire le temps que leur demande de protection soit analysée sur le fond un à deux ans plus tard, devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada.

[J’avais écrit un très long bout sur le déroulement de ce genre d’audiences, mais je réalise que ça n’intéresse surement personne sauf moi, alors je vous épargne tout ça. Pour avoir une meilleure idée d’à quoi ressemble ces audiences, je vous invite à lire l’excellent roman Boat people de Sharon Bala, traduit en français sous le même titre. C’est décrissant! Pour les autres, sachez seulement que le processus est terriblement pénible et traumatisant pour les victimes de violence. Sachez aussi que les démarches sont très coûteuses et qu’en moyenne 30% des dossiers sont rejetés et vont donc en appel6.]

L’entente Biden-Trudeau, un shit show à saveur populiste

Première chose à savoir : l’ensemble de l’entente sur les tiers pays surs est actuellement contesté en Cour suprême. Cette saga a commencé dans la première année du mandat de Trump aux États-Unis. Avec ses politiques migratoires cowboy, les groupes de défense de droit canadien ont arrêté de considérer les États-Unis comme un pays sécuritaire pour les migrant-es et ont remis en question la constitutionnalité de l’entente qui ne respectait plus, à leurs yeux, la charte des droits et libertés. Les audiences sont terminées, une décision devrait être rendue sous peu.

Donc faire un deal sur le side ce n’est pas particulièrement nécessaire puisque tout pourrait être à refaire d’ici quelques mois.

Cela dit, l’entente Biden-Trudeau entrée en vigueur le 25 mars 2023 vient confirmer l’application rigoriste de l’entente sur les tiers pays surs. Ainsi, elle ferme la brèche dans qui permettait aux demandeur-euses d’asile de contourner l’entente. Pour faire simple : oui, le side deal ferme techniquement le chemin Roxham à quelques exceptions près, notamment pour les mineurs non accompagnés (en moyenne 4 par jour), les personnes qui ont de la famille au Canada ou les personnes faisant face à la peine de mort aux États-Unis (no joke!)7. Les autres demandeur-euses ne pourront plus, jusqu’à nouvel ordre, entrer au Canada par ce point de passage pour demander l’asile.

Mais tsé… l’immigration ce n’est jamais aussi simple.

L’entente Biden-Trudeauprévoit une nouvelle exception : si des personnes traversent depuis les États-Unis et réussissent à ne pas se faire prendre par les autorités dans les 14 premiers jours, elles pourront demander l’asile au Canada. Comment arriveront-elles à prouver le moment exact de leur traversée pour avoir accès à cette mesure? Cela demeure un mystère! J’ai tellement hâte à la jurisprudence qui va analyser une preuve fondée sur la véracité des reçus de Tim Horton des demandeur-euses… Du gros bonbon juridique!

Enfin, la nouvelle entente prévoit que le Canada acceptera 15 000 migrant-es de plus cette année en provenance de « l’hémisphère occidental ». Qu’est-ce que ça veut dire tout ça? Quel statut auront ces personnes? Est-ce qu’elles seront ici de façon temporaire ou permanente? Ce seront des demandeur-euses d’asile ou des réfugiés? Honnêtement, c’est vraiment confus! Même le ministre Fraser a refusé de donner des précisions à ce sujet…

Réfugié-e ou demandeur-euse d’asile?

Enfin, la distinction entre le statut de réfugié-e et celui de demandeur-euse d’asile fait souvent l’objet de confusion.

Il faut savoir qu’on ne peut pas demander l’asile depuis l’étranger. Comme on vient de voir, les personnes qui viennent chercher l’asile au Canada doivent le faire une fois à l’intérieur de ses frontières. Ainsi, contrairement au discours médiatique présentant les demandeur-euses d’asile comme des « migrant-es irréguliers », sachez qu’il n’y a aucune « bonne façon » ou de façon « régulière » de demander l’asile. Quand ta vie est menacée… bein tu décâlices! Peu importe comment et généralement sans trop réfléchir ou planifier. Beaucoup de demandeur-euses d’asile fuient des persécutions individuelles, comme les violences de groupes armés (gang, narcotrafiquants, être menacé pour être du mauvais bord politique, etc.), les violences sexistes (violence conjugale, mariages forcés, mutilations sexuelles, crimes d’honneur, etc.) ou les violences homophobes (menaces de mort, torture, thérapies de conversions, etc.).

À l’inverse, les réfugié-es sont des personnes qui ont entrepris toutes les démarches légales pour obtenir la protection d’un État avant de voyager vers celui-ci. Ces personnes arrivent donc au pays avec tous les bons papiers pour refaire leur vie ici. Le statut de réfugié est généralement octroyé à des personnes qui sont collectivement menacées, par une guerre, par exemple. Tous les réfugiés sont parrainés, soit par le gouvernement, soit par des groupes communautaires. Ceux-ci ont la responsabilité de soutenir financièrement les réfugiés pendant leur première année et doivent leur fournir le nécessaire pour combler leurs besoins de base. Ce faisant, le nombre de réfugié-es accepté-es par année est limité.

Fait intéressant, le choix des dossiers acceptés par le Canada est éminemment politique. Lors de la guerre en Syrie, pratiquement seules les personnes de confession chrétienne ont pu s’installer ici. Dans ce contexte, pas étonnant que les Ukrénien-nes aient eu la priorité sur les Afghan-nes…

Des mythes tenaces au sujet des demandeurs d’asile

  1. Ils et elles se font payer l’hôtel tout inclus

Une fois qu’ils sortent du centre de détention, les demandeur-euses d’asile peuvent être pris en charge par des organismes qui offrent de l’hébergement temporaire. On parle de séjours d’un maximum de 3 semaines, le temps que les migrant-es trouvent un logement. Je ne sais pas qui trouve un logement en 3 semaines à Montréal… Rendu là, ça relève du miracle! Les ressources d’hébergement sont effectivement débordées, mais pas parce qu’on est envahi, seulement parce que tous les gouvernements des dernières décennies sous-financent les services sociaux. Bref, il manque de place, ce qui a forcé les institutions à réquisitionner des hôtels pour y loger temporairement les migrant-es. On ne parle pas ici d’hôtels de luxe offrant du service aux chambres. On parle plutôt de familles nombreuses dans une seule chambre, pas de cuisine ou de quelconques installations pour faire à manger. Bref, rien d’adapté aux besoins des nouveaux-elles arrivant-es.

  1. Ce sont des « Voleurs de jobs » et des « BS » en même temps!

Une fois sortis de détention, les demandeur-euses d’asile peuvent demander un permis pour avoir le droit de travailler. Actuellement, ce permis met environ 9 mois à arriver. En attendant le précieux document, les migrant-es ne peuvent pas travailler, mais elles sont autorisées à faire une demande de prestation d’aide sociale. La très vaste majorité d’entre eux préfèrerait travailler dès leur arrivée, mais ils et elles ne peuvent tout simplement pas le faire.

Par ailleurs rappelons, que les besoins des demandeur-euses d’asile à leur arrivée sont importants. Ils et elles repartent littéralement à zéro avec seulement quelques vêtements dans leur sac à dos. Il faut donc acheter des meubles, des électros, des vêtements d’hiver pour les enfants, des objets de cuisine ou toute autre nécessité en plus de se nourrir et se loger. Ce n’est certainement pas avec 923$ par mois pour une personne seule ou 1431$ pour un couple qu’on arrive à faire tout ça.

Plusieurs personnes seront donc tentées de travailler « au noir » pour répondre à l’ensemble des besoins. Or, sans permis de travail, les migrant-es héritent souvent des emplois les plus pénibles et dangereux, généralement pour des salaires dérisoires, en plus de risquer de se faire prendre par les autorités8.

Malgré tout, ces personnes sont souvent perçues par les travailleur-euses locaux-les comme une menace à leurs propres conditions de travail. Avant que les discours sur la supposée « pénurie de main-d’œuvre » prennent autant de place, ces travailleur-euses étaient souvent qualifié-es de « voleur-euses de job ». Maintenant on dit plutôt que ces dernier-ères font une pression à la baisse sur les salaires parce qu’ils et elles sont prêt-es à accepter n’importe quoi.

La solution ici la gang, c’est la solidarité entre travailleur-euses contre les patrons. Rien d’autre!

  1. Ça ne parle même pas français tout ce monde-là

Oui, les demandeur-euses d’asile ont droit à la francisation et oui, durant les mois suivant leur arrivée, je peux vous le garantir que tout le monde va aux cours parce que tant qu’à ne pas avoir le droit de travailler, aussi bien aller chercher quelques sous de plus avec les prestations pour apprentissage de la langue en plus d’acquérir des compétences qui permettent de trouver une meilleure job après.

Pis, tous les enfants demandeur-euses d’asile vont à l’école en français, ça fait qu’en quelques mois, ils et elles deviennent les interprètes de leurs parents, quand ils en ont. T’essayeras d’apprendre toi-même à ta mère qu’elle a le cancer quand tu as 12 ans. C’est rough en ostie!

Qu’est-ce qu’on tire de tout ça?

D’abord, quelle que soit la situation à la frontière, quand les gens se sentent en danger, ils vont trouver un moyen de passer. Peu importe la hauteur des murs, la longueur du désert ou la profondeur de la mer. Ça ne sert à rien d’essayer de les empêcher. Pis honnêtement, vous feriez surement la même chose si vous étiez à leur place.

L’avantage qu’on avait avant l’entente Biden-Trudeau, c’était qu’on pouvait savoir plus ou moins exactement le nombre de personnes qui entraient au pays sans passer par un poste frontalier. Maintenant, on peut s’attendre à ce que le nombre de personnes qui s’installent au Canada sans papiers sans entreprendre des démarches pour régulariser leur situation migratoire va bondir. Si tout ce beau monde anti-immigration avait l’impression qu’on avait perdu le contrôle de nos frontières, ils ne sont pas prêt-es pour ce qui s’en vient.

Enfin, demander l’asile, c’est un processus difficile, souvent humiliant, toujours précarisant. Les demandeur-euses d’asile se retrouvent trop souvent dans les pires, mais ô combien essentiels, emplois. Le mieux qu’on puisse faire c’est d’être solidaires.

Noé’e

1 Gouvernement du Canada, Demande d’asile 2018, En ligne, https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/services/refugies/demandes-asile/demandes-asile-2018.html (28 mars 2023) Je vous conseille d’ailleurs de jeter un œil à tout ça, c’est vraiment intéressant !

2 De manière générale, les personnes qui proviennent de pays « du nord global » n’ont pas besoin de demander un visa de touriste avant de voyager. L’étampe apposée dans le passeport par un douanier à l’arrivée agit comme visa de visiteur.

3 Pour des considérations d’efficacité et de clarté, ce texte sera concentré uniquement sur les migrant-es qui transigent des États-Unis vers le Canada. Sachez cependant que le flux migratoire est important des deux sens.

4 Accord entre le Gouvernement du Canada et le Gouvernement des États-Unis d’Amérique pour la coopération en matière d’examen des demandes de statut de réfugiés présentées par des ressortissants de pays tiers, 5 décembre 2002, en ligne : https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/organisation/mandat/politiques-directives-operationnelles-ententes-accords/ententes/entente-tiers-pays-surs/version-finale.html

5 Agence des services frontaliers du Canada, Centres de surveillance de l’immigration, En ligne, https://www.cbsa-asfc.gc.ca/security-securite/ihc-csi-fra.html (12 janvier 2023)

6 Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés, Statistiques de la Section de la protection des réfugiés (SPR), En ligne, https://irb.gc.ca/fr/transparence/cartable-ccp-nov-2020/Pages/pac10.aspx?=undefined&wbdisable=false#:~:text=La%20SPR%20a%20r%C3%A9gl%C3%A9%20un,rapport%20%C3%A0%20l’exercice%20pr%C3%A9c%C3%A9dent (28 mars 2023)

7 Gouvernement du Canada, Entente entre le Canada et les ÉtatsUnis sur les tiers pays sûrs, En ligne, https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/organisation/mandat/politiques-directives-operationnelles-ententes-accords/ententes/entente-tiers-pays-surs.html (28 mars 2023)

8 À ce sujet, je vous invite à visionner le documentaire « Essentiels ». Ça donne une bonne idée des conditions dans lesquelles ces personnes peuvent travailler. https://www.telequebec.tv/documentaire/essentiels

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Salaires impayés pour deux travailleurs sans-papiers : Une victoire pour lancer l’année!

Une nouvelle année s’est terminée et encore une fois, elle fut synonyme, pour nombre de travailleuses et travailleurs, de salaires impayés, de congédiements déguisés et dintimidation de la part de leurs employeurs. Trop souvent, ces patrons malhonnêtes tentent de sen tirer impunément.

Ce fut le cas récemment pour deux travailleurs sans-papier. De passage au Canada pour quelques mois, ils furent embauchés comme plongeurs dans un restaurant branché et fancy du quartier St-Henri. Payés sous la table, ils devaient recevoir leurs derniers chèques par le biais de ladresse dune amie et ce, une fois repartis dans leurs pays dorigine respectifs.

Évidemment, les chèques nont jamais été envoyés. Difficile de mettre de la pression quand on est pas dans la région, quand ni le français ni langlais sont nos langues dusage.

Contacté par lamie de nos deux camarades, le syndicat sest mis en branle. Nous avons premièrement appelé leur ancien patron pour lui faire part de la situation. Le chef-cuisinier a vite fait de nier connaître ses deux anciens employés et tenté de dévier la conversation, pour finalement admettre à demi-mots que si ses deux personnes lui écrivaient sur son courriel personnel il tenterait de clarifier « la situation ».

Nous avons donc rédigé un petit message en notre nom et celui des deux travailleurs lésés que nous lui avons envoyé. À lui ainsi qu’à ladministration du restaurant, et ce sans omettre de mentionner quavenant une réponse négative de leur part, nous entamerions une campagne publique à leur endroit. La réponse ne sest pas faite attendre. Soudain, les patrons du restaurant se souvenaient du travail effectué par nos camarades et tenaient à régler ce simple « malentendu ». Les chèques étaient prêts le lendemain et les patrons sexcusaient.

Si nos employeurs aiment utiliser les frontières comme prétexte de malversation ou dintimidation, la solidarité syndicale se doit de les abolir. Les Normes du travail sont supposées nous protéger, mais elles tiennent peu compte de la réalité que nous vivons au quotidien. Cest dire que si souvent les boss sessayent à voler des salaires, il nen tient qu’à nous, travailleuses et travailleurs, pour réclamer ce qui nous est du! Nous continuerons en 2018 à aider nos collègues et camarades à faire valoir leurs droits, mais aussi à sorganiser.

Bonne année de luttes syndicales!

Immigration et soudain, les pauvres d’ici sont devenus importants

Aux IWW Montréal, nous sommes plusieurs à travailler ou s’impliquer dans le milieu communautaire. Que ce soit en droit du logement, prévention de l’itinérance, l’accès à l’aide médicale pour les sans-papiers, la prévention des ITSS, la défense de droits auprès de personnes assistées sociales, etc.

Il y a un peu plus d’une semaine, une nouvelle faisait les manchettes : une vague d’immigrant-
e-s haïtien-ne- s commençaient à affluer des États-Unis en demandant l’asile et étaient
actuellement logé-e- s au stade olympique, résultat des politiques toxiques d’Uncle Trump.

Et il n’en fallait pas plus pour que les peurs racistes s’éveillent. Que ce soit par l’influence du
tapage médiatique à la sauce panique épicée, par affinité avec les discours identitaires ou par
méconnaissance du sujet, le réflexe xénophobe est vite remonté à la surface. Et les groupes
d’extrême-droite ont vite fait de récupérer ce nouvel épouvantail.

Sauf que cette fois-ci, comme ce ne sont pas de « dangereux arabes infectés de charia », mais
plutôt des personnes d’origine haïtienne, accueillies aux USA depuis le tremblement de terre
de 2010, il est difficile d’invoquer une quelconque guerre des civilisations ou une invasion
religieuse pour refuser leur venue.

C’est donc, ironie du sort, les pauvres d’ici qui ont servi de prétexte aux groupes et individus
racistes : « Commençons par aider nos pauvres avant d’aider ceux des autres. » « Nos vieux
sont maltraités et on va dépenser de l’argent qu’on a pas pour accueillir des étrangers à gros
frais. » « Et après on se demande pourquoi on a pas d’argent pour nos hôpitaux. »
Si déjà l’IWW prône l’ouverture des frontières, l’antiracisme et la solidarité entre travailleuses et
travailleurs, quel que soit leur origine, ces arguments bidons et malhonnêtes nous mettent
franchement en colère, voire en tabarnak. Et pour plusieurs raisons, que nous voulons démolir
ici et maintenant.

Premièrement, de vouloir mettre le poids des politiques d’austérité libérales (au sens
économique, parce qu’on s’entend : PLQ, PQ, CAQ, même combat…) sur les épaules de ceux
et celles qui en paient tout autant les frais est bien dégueulasse. Soyons clairs : les pauvres,
qu’importe leur pays d’origine, subissent les choix économiques et politiques de la classe
dominante. Les seuls qui profitent des coupures dans nos services publics et de leur
privatisation, ce sont les patrons et les riches.

Deuxièmement, dire que l’on manque d’argent et que l’on doit donc favoriser nos pauvres à
nous plutôt que ceux et celles d’ailleurs, eh bien, c’est un faux choix. De l’argent, il y en a, on a
qu’à voir les salaires et bonus que se donnent nos élites politiques et patronales, les
subventions et aides financières faramineuses données à certaines entreprises bien de chez
nous (Bombardier, entres autres, qui reçoit plus d’un milliard de dollars d’aide financière de
l’État, tandis qu’ils mettent dehors ses employé-e- s et que les patrons se payent des salaires
exorbitants) ou bien les sommes astronomiques que nous laissons aller dans les paradis
fiscaux.

Alors, non seulement il y en a du fric, mais plutôt que d’aller le chercher chez ceux et celles qui
en ont un char pis une barge, on préfère leur laisser et aller en chercher dans les poches de la
classe ouvrière. Le seul choix que nous avons, c’est de s’organiser pour aller récupérer cet
argent, et dans les poches de ceux qui l’ont, soit nos riches bien à nous.

Troisièmement, utiliser « nos pauvres» pour exiger de fermer nos frontières sous prétexte de ne
pas les priver de services, c’est franchement hypocrite. Ces groupes d’extrême-droite, ou ces
personnes réactionnaires, sont bien souvent les premiers à se scandaliser à propos des « BS »,
à traiter les personnes assistées sociales comme des profiteurs vivant au crochet de la société,
à espérer que l’on coupe les vivres aux plus précaires. Mais là, soudainement, on jurerait que «
les pauvres d’ici » sont une priorité!

Alors quand le milieu communautaire se mobilise contre les coupures de services et pour des
personnes de toutes origines, c’est justement contre des intérêts intimement liés à la droite. Et
c’est bien normal, parce que la droite n’en a rien à faire de la solidarité de classe, car cette
dernière ne s’arrête pas à une couleur de peau, une nationalité, un sexe ou un genre.

Blâmer les maux, les difficultés, que vivent nos communautés sur d’autres personnes qui en
arrachent tout autant, plutôt que de diriger notre indignation vers ceux qui profitent de notre
travail et de nos malheurs, est donc non seulement lâche, mais le signe d’un agenda politique
hypocrite.

 

Travailleuses et travailleurs du communautaire, syndiqué-e-s IWW

 

 

Crédit photo: Radio Canada

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Entente conclue au Frite Alors! Rachel

Le vendredi 15 décembre 2016, les employé.es du Frite Alors! Rachel en sont finalement venu.es à une entente avec la partie patronale. Un virage majeur pour les wobblies qui reprennent ouvertement pignon sur rue à Montréal et une première pour le mouvement syndical qui voit naître de nouvelles manières de fonctionner en dehors des limitations du cadre légal.

Nous nous rappelons que le communiqué de presse envoyé le 27 août dernier pour annoncer leur affiliation au Syndicat Industriel des Travailleurs et Travailleuses – Industrial Workers of the World (SITT-IWW), incluait une liste de points qu’ils et elles voulaient voir changer sur leur lieu de travail. On y parlait entre autre d’augmentations de salaires en cuisine et au service, d’augmentations annuelles, d’une standardisation des formations, d’une priorité à l’interne lors de l’ouverture de nouveaux postes, d’un plancher d’heures garanties, d’une compensation pour les quarts de travail en stand-by et de congés maladie.

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Solidarité avec les coursiers et coursières à vélo de San Francisco

Il y a quelques jours à peine, alors qu’une première rencontre des membres du Comité d’organisation pour un Syndicat des coursiers et coursières à vélo chez Sprig.Inc à San Francisco était organisée, l’employeur décréta l’équivalent d’un lock-out d’une semaine suivi d’un retour au travail avec un horaire coupé de moitié.

Les coursiers et coursières à vélo qui ne faisait déjà que 13,50 de l’heure, soumis à une politique de la compagnie leur interdisant de recevoir un pourboire, ont ainsi vue leur horaire passer d’une trentaine d’heure par semaine à de 3h à 15h seulement. Alors que les organismes qui se sont penchés sur la question évaluent le salaire décent à 14,37 pour la région de San Francisco, rappelons que les coursiers et coursières font un métier aussi exigeant physiquement que dangereux. On exige notamment qu’ils et elles soient capable de franchir des distances de 3 à 5km en zone urbaine en moins de 15minutes.

Les membres du syndicat se sont déjà entretenu à de nombreuses reprises avec la direction de Sprig.Inc afin de demander une compensation pour les heures et les journées de travaillent qui furent coupé, de même que des augmentations de salaire et de meilleures conditions de travail, mais la partie patronale semble déterminer à laisser trainer l’affaire aussi longtemps que possible. Les coursiers et coursières à vélo de San Francisco, regroupé sous le Syndicat Industriel 540, en appellent donc à la solidarité des individus, des communautés et des organisations concernées à les appuyer dans leur démarche.

Pour support les coursiers et coursières à vélo en négociation:
https://rally.org/couriersunion?utm_source=leader_banner

Solidarité!

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Les Wobblies à travers le monde, Chronique de Mars.

En date du 1er janvier 2016, Randall Jamrok, secrétaire-trésorier général de l’IWW, finissait de faire les comptes et nous annonçait que l’IWW compte désormais plus de 3500 membres. Majoritairement répartie entre l’Amérique du Nord et l’Angleterre on les retrouve aussi en Norgève, en Allemagne, en Lithuanie, en Austrie, en Suisse, en Grèce, en Australie et en Chine. Si cette chronique mensuelle ne ce veut pas une liste exhaustive des activités de chacune des 50 et quelques sections locales qui constituent actuellement le Syndicat pour Tous et pour Toutes, elle tentera tout de même, tant ben que mal, de mettre un peu de lumière sur les activités des wobblies de partout à travers le monde.

Le 1er mars, le fellow worker James, de la branche de Balti10569076_720396931330843_5408464749728183823_nmore se faisait finalement versé rétroactivement les 7500$ de salaire que les magasins Jimmy Johns lui devaient après l’avoir congédié illégalement pour activité syndicale. Un jugement similaire fut rendu par le National Labor Relation Bord quelques semaines plus tard, au sujet des employé.es congédiés.es des les franchises de Minneapolis. Rappelons que la campagne d’organisation des restaurants « Jimmy John » avait été lancée à Minneapolis en 2007 pour sortir publiquement dès 2010 avec l’organisation des 10 succursales rapidement rejointes par les fellow workers de Baltimore.

Toujours à Baltimore, le 2 mars dernier, le café-libraire Red Emma, anciennement accrédité au SITT-IWW, org10405585_751876278193930_2607770610963710947_nanisait le lancement de la dernière édition du livre du défunt Franklin Rosemont  Joe Hill et la création d’une contre-culture ouvrière révolutionnaire. Pour l’occasion David Roediger et Kate Khatib, des ami-es, collaborateur et collaboratrice de Rosemont furent invité-es à prendre la parole.

Le 15 mars, la section-locale de Montréal organisait un BBQ pour souligner la journée internationale contre la Brutalité Policière. La manifestation qui suivit attira plus de 200 personnes qui pour la première fois depuis de nombreuses années réussirent à prendre la rue et à terminer la manifestation sans arrestation de masse ni violence policière.

Le 19 mars, l’IWW Sheffield organisait une journée de formation axée sur les rapports d’oppressions reliés au genre, au sexe et à la sexualité sur les lieux de travail.

Des Formations d’Organisation 101, formation expliquant comment lancer un syndicat IWW sur son lieu de travail, furent organisé à Hartford, Détroit, Mineapolis, Milwaukee et Edmonton.

Deux émeutes secouèrent les prisons de l’État de l’Alabama, ctexaslockedin-300x288teau fort du Comité d’Organisation des Travailleurs et Travailleuses Incarcéré-es de l’IWW (IWOC-IWW), Au cours des dernières semaines. Pendant ce temps, les membres de l’IWOC au Texas se préparent à lancer une série d’arrêts et de ralentissement de travail afin d’obtenir des réformes dans les dossiers de la libération sur parole, de l’accès aux soins de santé et du système carcéral en général afin que les travailleurs et travailleuses incarcérées soient traités humainement.

Des membres de la branche de Portland se joignirent le 26 mars au Portland Solidarity Network pour tenir une ligne de piquetage devant LKQ Foster Auto Parts en solidarité avec le fellow worker Andrew congédié, alors qu’il tentait de s’organiser avec ses collègues contre la stagnation des salaires, la dangerosité de leur environnement de travail, le manque de transparence de la direction et le harcèlement au travail.

Déjà à sa sixième grève de la saison, Familias Unidas por la Justiciale organisait le 31 mars une manif-action au siège social de Driscoll à Watsonville en Californie afin de combattre les conditions de travail inhumaines des travailleurs et travailleuses migrant.es employé.es par la compagnie.

Notons pour terminer que l’été promet une modification géographique et démographique majeure pour l’IWW, majoritairement situé dans le Nord des États-Unis et en Angleterre! Alors que d’un côté les officiers et membres du Comité d’Organisation Régional Canadien, fier-es d’avoir assisté à la création des branches de Sherbrooke et Québec travaillent d’arrache-pied à la mise sur pied d’un projet visant une augmentation de 50% de leur membership et la création de 3 nouvelles branches en sol canadien (Drummondville, Kitchener-Waterloo et Saskatoon). Du côté du Sud des États-Unis, de nombreux membres se sont réunis pour organiser une tournée de conférences visant à faire la promotion du Syndicalisme de Solidarité dans leurs régions en plus de soutenir les efforts du Comité d’Organisation des Travailleurs et Travailleuses Incarcéré.es (IWOC-IWW) qui prévoit de nombreuses grèves et actions qui culmineront lors d’une grève nationale le 9 septembre prochain!

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Syndicalisme de fast-food: la syndicalisation de McDonald et la McDonaldisation des syndicats.

Organisateur aux IWW, Erik Forman dresse un grand historique de l’industrie de la restauration rapide, des tactiques des syndicats corporatistes et indique des directions à suivre afin de permettre aux travailleuses et travailleurs de la restauration rapide de remédier, à travers une organisation autonome, aux situations problématiques qu’il énumère.

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Le fast-food c’est l’Amérique. Premièrement fondée lors de la longue période de boom économique d’après-guerre, l’industrie s’impose parmi les autoroutes, banlieues, maisons unifamiliales, centres commerciaux, de l’automobile et de la télévision comme un véritable organisme vivant au sein de l’écosystème de la culture américaine de consommation. Dès l’aube de la Guerre Froide au crépuscule de la grande récession, l’industrie du fast-food est façonnée, puis façonne les valeurs centrales de la société américaine.

Notre désir de satisfaction instantanée a été comblé par un service rapide et le sourire (forcé) du service au volant. Le carrousel incessant de publicités télévisées montrant des boissons et sandwichs nouveaux et améliorés n’a fait que nourrir encore et encore la dépendance américaine à l’inédit – et meilleur – produit. Des repas surdimensionnés à l’image de notre calcul apparemment rationnel que plus gros c’est mieux. D’un mode de production à la Taylor en passant par des burgers et des frites génétiquement modifiés et bourrés de pesticides, la direction des entreprises a accompagné ses produits d’une allure scientifique, chatouillant ainsi l’amour des américain-e-s pour la prévisibilité engendrée par la technologie. Assoiffés par des profits résultants des économies d’échelles hautement rationalisées, les cadres des chaînes de fast-food ont colonisé le décor des États-Unis avec d’éclatants symboles de leurs empires corporatifs, et ce d’un océan à l’autre. Entretenant et entretenu par une culture préférant l’image à la réalité, l’apparence à la substance et un profit immédiat à une planification à long terme, le peuple américain est facilement interpellé par le chant de sirène que sont les publicités montrant des burgers reluisants. Les consommateurs américains feront engraisser les coffres des chaînes de restauration rapide pour un montant projeté de 191 million de dollars en 2013. Au même rythme que croit l’industrie du fast-food aux États-Unis, son emprise sur les valeurs de la société américaine s’étend. Nous sommes ce que nous mangeons. L’Amérique c’est le fast-food.

En 1993, le sociologue George Ritzer a donné son nom à cette «McDonaldisation de la société» en notant que «les principes de la restauration rapide en viendront à dominer de plus en plus de secteurs de la société américaine ainsi que du reste du monde». Ritzer dénonçait la mise au pas d’un groupe croissant d’institutions vers les quatre valeurs fondatrices de l’industrie du fast-food: l’accélération des rapports humains dans un but d’«efficacité», réduire la vie à un «calcul» confondant qualité et quantité, la «prévisibilité» d’une expérience humaine standardisée ainsi qu’une obsession d’un contrôle bureaucratique à l’aide de la technologie. En revisitant le diagnostique élaboré par Max Weber et les théoriciens critiques de l’école de Francfort, Ritzer décrit le malaise se trouvant au cœur de notre société McDonaldisée comme étant l’«irrationalité de la rationalité» – la subordination de toutes préoccupation au but ultime : le profit. Bien entendu, la McDonaldisation pourrait être la Disneyfication, la Walmartisation ou bien la Coca-colonisation… peu importe le signifiant, puisque derrière ces logos d’entreprises se déroule toute la logique d’un capitalisme à l’échelle planétaire.

Ayant saturé le marché américain dans les années 70, l’industrie du fast-food a tourné son regard cupide vers d’autres contrées, cherchant rapidement à transformer en machine de profit le système digestif de six milliards d’humains. Les Deux Arches dorées sont devenus un symbole d’avant-garde de la mondialisation. Dès les années 90, une quantité généreuse de McDonald, PFK et Starbucks est allée s’étendre à travers le monde, matérialisant l’esprit du temps, le triomphe du libre marché comme dénouement heureux de l’histoire. En 1997, McDonald a tiré plus de revenus d’opérations outre-mer que chez lui. Le chroniqueur néolibéral du New York Times Thomas Friedman a proclamé l’avènement de ce McMonde comme l’aube d’un nouvel ordre mondial, où tous trouveraient justice et liberté, affirmant que jamais deux pays ayant des McDonald ne pourraient se faire la guerre (il se trompait). Mais la liberté aux yeux des apologistes du capitalisme mondial a toujours impliqué une esclavagisme voilé pour la classe ouvrière de l’industrie du service croissante.

L’exploitation se cachant derrière chaque burger et chaque frite n’est plus secrète. Au cours de la dernière année, une vague de «grèves» d’une journée très télégéniques dans plusieurs restaurants a permis d’exposer cette triste réalité. C’est une réalité que je connais personnellement. De 2006 à 2012, je me suis impliqué dans deux campagnes syndicales avec les Industrial Workers of the World en tant que travailleur de fast-food chez Starbucks et Jimmy John’s. J’ai constaté de mes propres yeux que les profits astronomiques de l’industrie sont basés sur les péchés originels de la société américaine – racisme, sexisme et exploitation de la classe ouvrière. L’industrie du fast-food emploie un nombre disproportionné de femmes et de gens issus de minorités visibles dans des rôles sans avenir, à un salaire tournant autour du salaire minimum. Mes collègues et moi n’étions que des marchandises pour nos patrons, tout comme les grains de café ou la viande, des biens à utiliser lorsque tournent les affaires, puis mis de côté quand les temps sont plus durs. Nos horaires variaient fortement d’une semaine à l’autre, selon ce que dictait le système automatisé de l’entreprise, nous empêchant de planifier ou de se faire un budget. Le travail réunissait toutes les joies répétitives d’une chaîne de montage d’usine, avec tout le charme des abus psychologiques habituels des clients. Chez Starbucks, le manque chronique de personnel a transformé nos quarts de travail en une frénésie de mouvements constants pour servir des lattés et Frapuccinos à une file de clients sans fin. Notre patron nous a montré sa gratitude en nous payant à peu près le salaire minimum. Lors des jours les plus bondés, il «demandait» aux travailleuses et travailleurs de rester après la fin de leur quart, puis il effaçait les heures supplémentaires de la feuille de paye. Comble de l’insulte, il faisait fréquemment des remarques sexuellement explicites envers mes collègues féminines. Ma patronne chez Jimmy John’s avait pour habitude d’agrémenter ses diktats de menaces de mort : «Je vais te poignarder» si tu n’étends pas la mayo plus doucement ou «Je vais ramener un fusil à pompe et te tirer dessus» si la préparation des sandwichs est trop lente. Mais si ce n’étaient pas de bons emplois, ils étaient pourtant dur à conserver. Comble du ridicule, une collègue du Starbucks a perdu son assurance maladie, parce qu’elle était trop malade et ne travaillait plus suffisamment d’heures pour y être admissible. Incapable de se permettre le traitement médical, elle a manqué un quart de travail, car transie de douleur. Elle n’a pu se permettre d’aller voir un médecin et se procurer un papier pour le prouver et elle fut donc renvoyée. Deux de mes collègues ont tenté de se suicider durant mes six années passées chez Starbucks, succombant au stress imposé par des gérants trop exigeants, des clients irrespectueux et l’angoisse de voir leurs rêves leurs échapper des mains, alors qu’ils s’enfonçaient encore plus profondément dans la pauvreté.

Malgré les conditions de travail déplorables qu’endurent les 3,6 millions de travailleurs et travailleurs du fast-food, les principaux syndicats ne leurs ont montré aucun intérêt avant la dernière année. Le «Vice Président Sénior» du local syndical UNITE-HERE de Minneapolis me disait en 2008, «on va pas aller syndiquer tous les groupes de travailleurs de McDonald qui viennent vers nous.» Il a ensuite refusé de soutenir nos efforts indépendants d’organisation chez Starbucks. L’ancien président du SEIU (Service Employees International Union), Andy Stern, a même dit qu’il applaudirait Starbucks s’ils payaient leurs dizaines de milliers de travailleurs et travailleuses à quelques cents au dessus du salaire minimum. Comment se fait-il qu’un mouvement ouvrier qui a mené les masses affamées dans une bataille contre les autocrates industrialistes à la barre du pays en arrivent à tourner le dos à ceux qui ont le plus soif de changement?

Syndicalisme corporatiste
Au cours de la période d’Après-guerre, au moment où les églises se transforment en cathédrales et où les boutiques familiales laissent la place aux centres commerciaux, la plupart des syndicats américains se transforment en syndicats corporatistes, adoptant une structure similaire à celle de leurs prétendus adversaires. Comme l’entreprise, un syndicat corporatiste est dirigé par une petite clique bien payée de présidents, vice-présidents et directeurs de tout et de rien – bref, des patrons – qui impose des directives par le biais d’une hiérarchie d’employé-e-s souvent exploité-e-s jusque dans les rangs de la base. Plutôt que d’habiliter les membres par une implication dans leurs propres luttes, les patrons syndicaux implantent une logique carriériste au cœur même du mouvement ouvrier. Le SEIU et UNITE-HERE – souvent, et ironiquement, perçus comme les syndicats les plus progressistes des États-Unis – ont tendance à embaucher comme organisateurs ou organisatrice de jeunes idéalistes issu-e-s de la classe moyenne et fraîchement diplômé-e-s d’université. Ces jeunes employé-e-s ont tendance à se brûler rapidement sous les demandes – et les contradictions – de l’emploi et repartent vers les études supérieures.

Cette façon de faire n’est que la pointe de l’iceberg. La montée du syndicalisme corporatiste au États-Unis n’est qu’un instant dans l’évolution d’une tension qui mijote au sein du mouvement ouvrier. Pour citer la Solidarity Federation dans Fighting for Ourselves, il est «possible d’identifier deux significations du terme “syndicat”. Le premier est simplement une association ouvrière…» et la seconde est «celle d’une représentation des travailleurs et travailleuses vis-à-vis le capital.» En tant qu’association de travailleurs et travailleuses, un syndicat a théoriquement un pouvoir illimité d’arrêter ou de transformer l’économie. En tant qu’institution «représentant» les travailleurs et travailleuses, un syndicat se comporte comme un «groupe d’intérêt» cherchant à influencer en utilisant les même outils de lobbying, de RP et de marchandage que n’importe quelle autre entreprise.

Plutôt que de s’en remettre au pouvoir associatif de leurs membre s’exprimant à travers des grèves perturbant la production, les syndicats corporatistes dépendent plus souvent du National Labor Relations Act de 1935 qui met en place un processus bureaucratique afin que les travailleurs et travailleuses puissent voter pour un syndicat les «représentant». Le NLRA est imbibé d’une politique qui transparaît dans son préambule : «Il est déclaré qu’il est une politique des États-Unis d’éliminer les causes de certaines obstructions substantielles au libre cours du commerce et d’atténuer ou éliminer ces obstructions lorsqu’elles se produisent en encourageant la pratique et la procédure des conventions collectives…» Il vaut la peine de le répéter : le code du travail américain a pour objectif de garantir le «libre cours du commerce», un but adopté de tout cœur par les leaders syndicaux de l’Après-guerre qui ont joyeusement désarmé la base, échangeant l’action directe pour des procédures bureaucratiques, tel les griefs et des clauses de non-grèves. C. Wright Mills les a même surnommés «Les nouveaux hommes de pouvoir», des hommes d’état pro-travailleurs et travailleuses enthousiastes d’agir comme petit partenaire du capital dans la Guerre Froide contre le communisme. Avec un élan en direction de la «fin de l’histoire» de notre propre époque, ces partisans du syndicalisme corporatiste ont chassé les radicaux hors du mouvement ouvrier, abandonnant le changement social qualitatif pour le remplacer par une vision étroitement limitée à des enjeux élémentaires et quantitatifs, se laissant ensuite bercer par le compte de fée Keynésien, d’éternels cycles d’augmentation de productivité reliés à l’augmentation des salaires négociés par les syndicats comme composante permanente de la politique et de l’économie américaine.

La bureaucratie syndicale a subis un dur réveil vers la fin des années 70. Les employeurs ont intensifié leur résistance face aux campagnes syndicales, menant au déclin du taux de victoires lors des élections du NLRB (National Labor Relation Board). Comme le notait le vétéran de la négociation syndicale Joe Burns dans Reviving the Strike, les syndicats n’ont pas répondu adéquatement aux défis des patrons, excluant le genre de confrontations collectives avec les employeurs qui ont rendu possible les ententes des années 30. Ils ont plutôt essayé de maintenir des ententes de «neutralité» avec les patrons à l’aide de négociations à la carotte et au bâton, souvent à l’insu des travailleuses et travailleurs. La carotte : les dirigeants syndicaux offrent un soutient politique au programme législatif de l’entreprise et jurent de ne pas négocier d’autres enjeux, allant même jusqu’à accepter des pertes salariales et des restrictions quant aux droits des travailleurs et travailleuses. Le bâton : le syndicat fera interférence dans l’application du programme politique et dans la croissance de l’entreprise jusqu’à ce que cette dernière accepte la neutralité. Les campagnes de neutralité ne jouent généralement pas sur le pouvoir associatif des travailleuses et travailleurs, mais plutôt sur des campagnes publicitaires, des amis haut-placés et des astuces d’avocats. Bref, sur la manipulation du système de représentation de notre société. La tâche d’un «organisateur» syndical se résume désormais à convaincre les travailleur de faire ce que le patron du syndicat demande plutôt que de les rassembler pour prendre des décisions en commun. Le plus souvent , l’implication des travailleuses et travailleurs dans les campagnes de neutralité se limite à des prises de photos lors de rencontres avec des politiciens, ou tout au plus à des grèves d’une journée pour la télévision. Pire encore, les syndicats engagent parfois des «supporteurs» qui tiennent des «actions directes» au nom des travailleurs et travailleuses. Généralement, les patrons syndicaux vont rechercher des campagnes selon une logique très corporatiste, en établissant les coûts engendrés et les profits que les nouvelles cotisations négociées vont rapporter. Pour la plupart des syndicats, les chances de réussite dans l’industrie du fast-food semblaient trop faibles par rapport aux bénéfices envisagés pour y investir des ressources.

Grèves dans le fast-food
Plusieurs personnes de gauche ont exprimé leur espoir de voir la mobilisation dirigée dans le fast-food par le SEIU et d’autres groupes dits “Alt-Labor” représenter une fracture avec la logique corporatiste du syndicalisme, ou du moins une ouverture pour aller plus loin que de simples grèves dans le fast-food et ainsi créer un mouvement transformateur. Il n’a pas été facile de mesurer ce que ces espoirs valent face à la réalité; le SEIU empêche son personnel de parler aux médias et laisse les membres de la base dans l’ombre quant aux plans du syndicat. J’ai donc contourné les porte-paroles officiels du SEIU et suis allé consulter des travailleurs et travailleuses et les membres du personnel au sein même de la campagne pour comprendre se qui se passe réellement.
Selon les dirigeant-e-s du SEIU, il aura fallu que les travailleuses et travailleurs du fast-food s’organisent eux et elles mêmes et défoncent pratiquement la porte du local syndical pour demander de l’aide à s’organiser. En vérité, les grèves pour le 15$ ne sont pas vraiment des manifestations spontanées. Selon des sources internes, la demande de 15$/heure n’a pas été émise par les travailleurs et travailleuses, mais plutôt par des consultants de Berlin Rosen PR Firm travaillant avec le SEIU. Les projets du SEIU sont en développement depuis au moins 2009. Selon une autre source interne, certaines villes furent initialement sélectionnées pour les grèves car le syndicat croyait pouvoir utiliser la couverture médiatique pour encourager de nouvelles lois. Les manifestations d’une journée n’ont donc pas été conçues comme armes économiques permettant des gains, mais plutôt comme des appâts dans la «marche médiatique», comme le notait Adam Weaver. Plusieurs activistes ont usé du terme wildcat strike (grève sauvage) pour définir ces grèves d’une journée. Une grève sauvage est une grève organisée par la base syndicale contre ou sans la bureaucratie. Ces dernières en étaient l’opposé total – des mobilisations dirigées du haut par les bureaucrates. Cela implique que les planificateurs du SEIU savaient qu’il y aurait une grève avant même les travailleuses et travailleuses. Par conséquent, l’organisation syndicale est désormais de convaincre la base d’adhérer à un projet axé sur les médias, mis en place par les dirigeants syndicaux, instrumentalisant les relations qu’entretiennent les employé-e-s avec les travailleuses et travailleurs et les poussent à fausser des chiffres pour garder leur emploi. Cette dynamique s’est avérée lorsque j’ai discuté avec des travailleurs-ses de trois villes qui m’ont affirmé que le nombre réel de grévistes était nettement moins élevé que celui rapporté par le SEIU. Étant donné l’inefficacité des communications (c’est-à-dire mentir au patron pour ne pas être mis à la porte) inhérente à toute hiérarchie d’entreprise, il est tout à fait possible que le SEIU lui même ne connaisse pas le nombre exacte de travailleuses et travailleurs ayant participé aux grèves.

S’inspirant du modèle corporatif, le SEIU a sous-traité la syndicalisation des fast-foods à des organismes communautaires – une section locale de Jobs with Justice, quelques groupes ex-membres de l’ACORN (Association of Community Organizations for Reform Now) et d’autres – dans le but de partiellement réduire les dépenses associées aux salaires des organisateurs. Un travailleur du fast-food impliqué dans la campagne me disait que «les organisateurs travaillent 12 heures par jour durant la semaine. Quand tu calcule leur revenu, ça donne moins que le salaire minimum.» Un ancien organisateur employé avait reçu l’ordre d’abandonner un groupe de travailleuses-rs du fast-food peu de temps avant une grève et de porter son attention sur un autre site où les patrons syndicaux croyaient pouvoir obtenir plus de capital médiatique. Le même organisateur a été renvoyé tout juste avant le temps des fêtes suite à une décision arbitraire par des haut-placés du syndicat, forçant sa famille à gratter les fonds de tiroirs pour mettre à manger sur la table pour leur jeune enfant. C’est sans surprise que, dans au moins une ville, des organisateurs ont formé leur propre syndicat pour combattre le modèle de gestion à haut roulement du SEIU.
Le traitement minable subi par ces organisateurs et organisatrices acharné-e-s démontre tout à fait le déficit démocratique au sein du SEIU. Des travailleuses et travailleurs anonymes au sein de la campagne disent être contraint-e-s de soutenir la stratégie déterminée par les dirigeants du syndicat, sans possibilité de discuter d’alternatives plus durables et transformatrices. Une source proche du SEIU m’a informé que des haut-placés de la campagne refusent d’organiser dans le but d’obtenir des gains immédiats par crainte qu’une trop grande victoire enlève aux travailleurs et travailleuses la volonté de se syndiquer. Alors que quelques villes ont adopté une approche plus orientée vers la base, la stratégie globale demeure hors de portée de cette dernière. Le SEIU a tenu un sacro-saint rassemblement national à Detroit avec des travailleuses et travailleurs qu’on avait convaincu de voter «Oui» pour la journée d’action nationale du 29 août, peu importe si celle-ci servirait à bâtir une organisation à long terme dans leurs communautés et lieux de travail. Le risque encouru par la syndicalisation rapide de première page demandée par le SEIU international est que les travailleurs-ses sont poussé-e-s à risquer leur emploi pour atteindre les quotas déterminés par les bureaucrates au sommet, sans se soucier de bâtir une base pouvant mener à un réel mouvement social réussi. Ryan Watt, travailleur à Potbelly’s de Chicago, était récemment en grève. Selon lui : «je crois qu’à cause de ça, mon gérant commence à riposter. Récemment, après la dernière grève, ils m’ont dit de rentrer chez moi et de ne pas revenir avant cinq jours parce que je suis revenu cinq minutes en retard de mon dîner.» Le gérant de Ryan ne l’a pas rappelé après cinq jours, ce qui signifie un renvoi de fait.

Le comité organisateur des travailleuses et travailleurs de Chicago combat ces représailles, mais de telles histoires sont susceptibles de se reproduire sans une stratégie impliquant plus de travailleurs et travailleuses dans le processus de syndicalisation avant de faire parader devant les caméras des individus isolés de différents restaurants. Étant donné la récente éviscération de Our Walmart, lors du renvoi de plus de 60 travailleurs et travailleuses militant-e-s, on aurait cru que le SEIU prendrait plus de précautions en créant une base forte avant de se dévoiler au grand public. Les dirigeant-e-s d’entreprises n’ont pas besoin d’entraînement pour ordonner aux gérant-e-s de démanteler les syndicats et d’ajouter des employé-e-s aux listes noires. Tous et toutes les gérant-e-s savent comment resserrer et appliquer sélectivement les règles afin de se débarrasser de travailleurs et travailleuses «fauteur-ses de troubles». Sans un redressement stratégique permettant de changer le rapport de forceavec les compagnies de fast-food, de telles représailles subtiles finiront par avoir un effet important sur la syndicalisation.
Il se pourrait que le SEIU n’en ait tout simplement rien à faire. Après tout, le syndicat a déjà obtenu ses 15 minutes de gloire devant les caméras pendant la campagne. Un porte-parole du SEIU a exprimé l’attitude déconcertante du syndicat face au prix que les travailleurs et travailleuses vont payer pour cette stratégie, me disant qu’ils et elles pourront facilement traverser la rue et obtenir un emploi dans un autre restaurant après s’être fait montrer la porte.
Avec toutes les décisions majeures entre les mains du SEIU international, le caractère bureaucratique de la campagne a engendré une dynamique raciale troublante. J’ai discuté avec plusieurs participants et participantes qui étaient consterné-e-s par le spectacle récurrent d’employé-e-s du syndicat principalement blancs criants des ordres à travers un mégaphone lors des grèves à des travailleurs et travailleuses de fast-food principalement noir-e-s ou hispaniques. À New York, un membre blanc du service d’ordre du SEIU a même poussé plusieurs travailleurs et travailleuses s racialisé-e-s pour les empêcher d’occuper un McDonald. Aux États-Unis, les hiérarchies sont trop souvent sujettes à un code de couleurs. Le SEIU et ses substituts n’y font pas exception.
Et que fait dire le SEIU au travailleuses et travailleurs? Si «15$ et un syndicat» est un bon slogan, les problèmes accablants la nation du fast-food ne se régleront pas par une augmentation salariale d’un dollar. Autre concession faite au nom des besoins médiatiques de la campagne, le Fight for Fifteen a recréé l’étroite focalisation économique du syndicalisme corporatiste de l’Après-guerre. D’autant plus malheureux, puisque l’industrie du fast-food constitue le nerf de la guerre du consumérisme capitaliste. Les travailleurs et travailleuses du fast-food peuvent parler et agir directement contre les horreurs de l’agriculture industrielle, la déshumanisation de la production Taylorisée et des hiérarchies absurdes des lieux de travail, la monoculture corporatiste, le fléau de la faim de la classe ouvrière, entre autres plaies qui découlent de leurs lieux de travail. Imaginez si un syndicat de travailleuses et travailleurs du fast-food soutenait une vision non-seulement de meilleurs conditions de travail dans une économie fondamentalement inhumaine, mais aussi d’une industrie de la nourriture contrôlée par les travailleurs et travailleuses dans le meilleur intérêt de toute l’humanité et de la planète. Une telle tournure est peu probable tant que les campagnes sont dirigées par des bureaucrates syndicaux qui ne se voient pas comme fossoyeurs du capitalisme, mais plutôt comme ses médecins.
Une évaluation honnête de la campagne jusqu’à maintenant nous pousse vers une conclusion inévitable – la logique corporatiste de l’industrie du fast-food est bien vivante à l’intérieur même des efforts de syndicalisation du SEIU. De la décision de prioriser la quantité de grévistes plutôt que la qualité de l’autonomisation des travailleurs et travailleuses et de la démocratisation, de privilégier des événements médiatiques accrocheurs et soutenir des changements législatifs plutôt qu’une organisation substantielle afin de bâtir un réel pouvoir. Tout cela en passant par un simulacre de communications méthodiques pensé par des consultants, par le mode opératoire centralisé du SEIU international, par l’horrible réalité du racisme institutionnalisé au sein de la campagne, par la réduction pécuniaire de l’objectif de la campagne tout en acceptant les fondement d’une société de classe. C’est cela le véritable syndicalisme de fast-food.

Syndicalisme néo-corporatiste
Y a-t-il un espoir pour les travailleurs et travailleurs, employé-e-s et sympathisant-e-s de transformer la syndicalisation des fast-food du SEIU en un mouvement plus large et à plus long terme pour engendrer des changements substantiels, comme le prédisent plusieurs personnalités de gauche?

Le SEIU n’est pas monolithique. Plusieurs perspectives s’y affrontent concernant la direction de la campagne du 15$ et concernant le niveau d’autonomie dans certaines sections (quoique constamment sous menace de tutelle). On voit toutefois un plus haut niveau de participation et de démocratie dans certaines villes que d’autres. Il y a des centaines de travailleurs et travailleuses courageux et courageuses et des dizaines d’employés-e-s acharné-e-s avec des principes, qui font tout en leur pouvoir pour passer d’un modèle transactionnel à un modèle transformatif à l’intérieur même des confins du SEIU.
Il est possible pour des membres de la base et des employé-e-s radicaux d’élaborer une stratégie qui se défait de la logique du syndicalisme fast-food, mais cette initiative ne viendra jamais du SEIU international ni sans combattre la bureaucratie. L’histoire du syndicat, ses tendances inhérentes au neo-corporatisme et les témoignages d’employé-e-s du syndicat nous en disent long sur ce que peuvent attendre les membres de la base et leurs allié-e-s. Un article de 2010 dans The Nation résumait le mode opératoire du SEIU sous la direction du président Andy Stern, «alors que la croissance devenait son unique passion, Stern s’en est remis à des ententes à huis clos avec les employeurs et d’autres raccourcis, perpétuant une illusion de croissance robuste ayant obscurci l’échec du SEIU à établir une stratégie viable pour contrer le déclin du mouvement ouvrier. Ce faisant, le leadership unilatéral de Stern a aliéné des membres de la base et a isolé le syndicat de plusieurs de ses ancien-ne-s allié-e-s.»
Alors que les factures de dispendieux services de relations publiques et de l’armée de personnel travaillant sur la campagne du 15$ s’accumulent, la pression augmente sur les patrons du SEIU pour conclure un marché qui pourra être présenté comme une victoire. Comme pour toute transaction commerciale, ce marché inclura un quiproquo. Les recherches de Steve Early sur les machinations du SEIU, parues dans son livre The Civil Wars in U.S. Labor, offrent un aperçu de ce que cela représente. À travers ses 339 pages, Early expose ce qui semble être une parade sans fin de cadavres sortant des placards du SEIU, plusieurs comportant non seulement les empreintes digitales d’Andy Stern, mais également de Mary Kay Henry et de la brochette de patrons actuels du SEIU.
Entraîné par la cupidité de la croissance à tout prix, identique à celle des entreprises qui lui font face en négociation, le SEIU s’est tourné vers une stratégie de «partenariat» avec les employeurs, ainsi qu’à du maraudage, afin d’augmenter ses revenus avec des cotisations supplémentaires. Au diable la démocratie ouvrière. Dans la plupart des cas, l’organisation syndicale récente se limite à faire signer par l’employeur une entente préétablie qui limite les droits des travailleurs et travailleuses à décrier ou agiter contre leurs problèmes au travail, délaisse le contrôle du lieu de travail à la gérance en ne permettant qu’un-e ou aucun-e délégué-e syndical-e sur place et limite les paramètres de négociation collective – le tout sans avoir préalablement consulté les travailleuses et travailleurs. Pire encore, dans le but de convaincre les employeurs de signer ces «partenariats», le SEIU va jusqu’à soutenir la mise en place de lois avantageant les patrons aux dépens de toute la classe ouvrière. Par exemple, en Californie et à Washington, le SEIU a fait pression pour limiter les droits de patients à poursuivre les hôpitaux et services de soins à domicile pour mauvais traitements, en échange d’une reconnaissance syndicale facilitée pour les travailleuses et travailleurs de la santé.
Une fois les termes de l’entente négociés par les professionnels syndicaux et patronaux, les organisateurs et organisatrices sont chargé-es de faire signer les cartes aux travailleuses et travailleurs, autorisant les prélèvements de cotisations sur le bulletin de salaire. C’est souvent la dernière fois qu’ils et elles verront un organisateur. Une fois syndiqué, le SEIU fait profil bas, entreposant ses membres dans de mégas locaux à des kilomètres des lieux de travail. Il devient donc impossible pour des travailleurs et travailleuses à petits salaires d’assister aux réunions où ils et elles pourraient avoir une voix, ni même de se présenter comme représentant-e syndical-e ou comme délégué-e. Ce travail est remis aux professionnels diplômés. Qu’est-ce qui leur reste? Un numéro 1-800 à appeler si elles et ils ont des questions ou des préoccupations.

L’auteur Early conclue que le SEIU est «une institution de plus en plus autocratique et profondément défectueuse qui n’est pas à la hauteur de ce qu’elle prétend, peu importe qui est responsable.» Il semble avoir raison. Alors que plusieurs espèrent que le SEIU ait pris un nouveau départ sous la direction de sa nouvelle présidente Mary Kay Henry et que la tactique de grève dans la campagne pour le 15$/h représente un distanciement du syndicalisme corporatiste habituel, un simple regard sous le tapage médiatique révèle les même vieilles dynamiques et tendances comportementales en action. Une source interne raconte que le SEIU a déjà ouvert la porte à la National Restaurant Association, offrant de la soutenir pour des réductions d’impôts sur les chaînes de fast-food en échange d’une quelconque entente de neutralité. Voilà ce que semble nous réserver l’avenir.
Au delà des grèves dans le fast-food

Au delà des critiques du modèle syndicale néo-corporatiste du SEIU, il y a aussi le fait que ça ne fonctionnera probablement pas. Cela fait maintenant plus de 30 ans que nous sommes dans une guerre d’annihilation du mouvement ouvrier par les employeurs américains. Tout comme dans les années 30, les employeurs vont tenir la ligne dure contre toute incursion syndicale à moins de faire face à une véritable menace existentielle. Le seul bras de levier assez long pour faire bouger la montagne d’opposition face au pouvoir ouvrier dans l’industrie du fast-food, c’est l’action directe massive par les principaux concerné-es sur une échelle jamais vue depuis la période tumulteuse de l’entre-deux-guerres. Les syndicats corporatistes ne sont pas près d’actionner ce levier. Comme l’écrivait l’ex-stratégiste du SEIU Stephen Lerner, «les syndicats ayant des centaines de millions d’actifs et des conventions collectives concernant des millions de salarié-es ne risqueront jamais leurs trésoreries et leurs contrats en s’engageant dans des actions à grandes échelle telles des sit-ins, des occupations et autres formes non-violentes de désobéissance civile défiants injonctions et pressions politiques.» On pourrait rajouter que même s’ils le voulaient, les syndicats corporatistes ont depuis longtemps ravagé leur base militante, aliénant les travailleurs et travailleuses par leur processus décisionnel de haut en bas et par les années de porte-à-porte étouffantes en soutien des Démocrates. Réticent et incapable de suivre la voie pouvant mener à une réelle victoire, le SEIU commencera à diluer son slogan de «justice pour tous», amenant des propositions pour moins de justice et pour moins de travailleuses et travailleuses (rétrécissant sa vision à de moins en moins de villes, de moins en moins d’entreprises et demandant de plus petites augmentations salariales) à la table de négociation et aux bureaux de vote. Si cela échoue, le SEIU tentera probablement de trouver un moyen de se retirer et se sauver la face. Ironiquement, cela pourrait donner plus d’espace aux travailleuses et travailleurs de s’organiser eux et elles mêmes. De façon plus tragique, cela pourrait également isoler des personnes ayant pris des risques face aux éventuelles représailles engendrées.
Heureusement, le syndicalisme fast-food du SEIU n’est ni le premier, ni le dernier mot de la lutte de classe dans cette industrie. Les travailleuses et travailleurs du fast-food ont combattu des patrons les exploitant depuis le début de cette industrie. Pour nommer quelques exemples, vers le milieu des années 60, McDonald était tellement préoccupé par la syndicalisation de ses employé-e-s de la baie de San Francisco, qu’ils ont rendu nécessaire la prise d’un test de détecteur de mensonges aux potentiels employé-es pour éliminer les sympathisant-e-s du syndicat. Le spécialiste anti-syndicat à temps plein de la chaîne a affirmé avoir écrasé des «centaines» de tentatives de syndicalisation au début des années 70. Au début des années 80, ACORN a lancé un syndicat des salarié-es du fast-food à Détroit qui a brièvement gagné une des seules conventions collectives dans les fast-food franchisés aux États-Unis. Au Royaume Unis, l’énigmatique McDonald’s Workers Resistance a mené une résistance anonyme de type guérilla contre les patrons entre 1998 et le début des années 2000. Malgré qu’aucun de ces efforts n’ait mené à une organisation à long terme, ils ont joué un rôle important dans la longue évolution d’une conscience de classe au sein de l’industrie du fast-food.
Alors que j’étais organisateur avec les IWW chez Jimmy John’s et Starbucks, nous avons appris des expériences de ceux qui nous ont précédé et nous avons créé un modèle d’organisation associatif fonctionnant dans l’industrie du fast-food. Notr modèle fut bâti sur notre propre force de travailleurs et travailleuses : la dépendance de notre patron à notre travail. Au lieu de dépenser des millions (que nous n’avions pas) pour payer des firmes de relations publiques et des employé-e-s à temps plein, nous avons misé sur une approche à long terme en entraînant nos collègues à devenir organisateurs ou organisatrices, leur donnant les armes nécessaires afin de mener leurs propres batailles, peu importe où ils et elles se retrouvent, et en prenant toutes les décisions ensemble de façon démocratique. Et nous avons gagné. Nous avons fait renvoyer notre patron qui volait nos salaires et harcelait sexuellement nos collègues, nous avons mis fin aux renvois injustes, nous avons fait installer l’air climatisé et fait réparer l’équipement brisé. Nous avons gagné un renforcement d’effectifs, nous avons obtenu ma réintégration après que j’ai été renvoyé par Starbucks pour avoir organiser mon lieu de travail et, à l’aide d’une courte grève, nous avons même forcé notre gérant de district à émettre un chèque pour un collègue n’ayant pas été payé. Lors d’une autre campagne des IWW, nous avons rédigé un «Programme en dix points pour la justice chez Jimmy John’s», rassemblant les dix demandes les plus importantes telles qu’identifiées par nos collègues, allant au delà des enjeux élémentaires afin d’aborder les questions fondamentales du contrôle du lieu de travail. Usant d’une escalade des moyens de pression à travers l’action directe, nous avons gagné la paye par dépôt direct, des augmentations, des congés payés, le droit d’absence pour cause de maladie, une politique disciplinaire cohérente ainsi que plusieurs autres demandes, expliquées plus en détail dans le New Forms of Worker Organization à paraître. Aucune de ces campagnes n’était parfaite et le mouvement ouvrier a encore beaucoup à apprendre à propos de l’organisation des travailleuses et travailleurs à faible revenu dans le service, mais notre expérience a mis une chose au clair : les travailleuses et travailleurs peuvent se déclarer indépendant-e-s de la bureaucratie des syndicats corporatistes, mener leurs propres batailles et les gagner.
Dans plusieurs villes, les bases militantes de la campagne pour le salaire minimum de 15$ ont déjà commencé à bâtir leurs propres organisations autonomes de bureaucratie, tissant des liens avec des sympathisant-e-s qui sont libres de toutes les entraves qu’implique recevoir un chèque signé par les patrons syndicaux. La lutte de classe n’a pas commencé avec le SEIU et ne prendra pas fin une fois qu’un contrat sera signé, qu’une loi sera passée, que le salaire minimum aura augmenté ou que les patrons des syndicats arrêterons de payer la facture de la campagne. La lutte continue; les emplois dans le fast-food sont les emplois du futur – pas seulement parce que 58% des emplois créés lors de la période de récupération post-2007 sont des emplois à faible revenu, mais aussi métaphoriquement – comme le notait George Ritzler, la logique corporatiste du fast-food a imbibé notre société de façon plus large. Qu’on travaille dans un McDonald, un bureau, un hôpital, une école, un organisme à but non-lucratif, le gouvernement ou n’importe aillers, nous avons tous vu un collègue subir des abus ou se faire renvoyer de façon arbitraire, être forcé de faire plus avec moins, se faire dire de lésiner aux dépens du public et se faire refuser une voix au travail et dans la société en général. Des millions de salarié-es vivent leur vie dans un désespoir discret, voyant leur labeur disparaître dans les rouages du système capitaliste. Un système qui se retourne contre eux et perpétue les maux auxquels ils et elles s’opposent: Les travailleuses et travailleurs du fast-food voient les produits qu’ils servent empoisonner leurs communautés, les travailleurs et travailleuses des banques voient leurs employeurs octroyer des prêts avec condition abusives à leurs voisins, les travailleuses et travailleurs des hôpitaux sont témoins de la façon dont le profit est mis aux devants du bien-être des patients et les professeurs croulent à voir la déshumanisation que les tests standardisés produisent sur leurs étudiant-e-s. Collectivement, les travailleurs et travailleuses produisent tous les maux de notre société, ce qui veut dire que collectivement nous pouvons arrêter de les produire. Et nous en avons la volonté, de plus en plus.
Ryan Wyatt, un gréviste chez Potbelly’s à Chicago, le décrit bien, «Nous ne demandons pas seulement de meilleures conditions de travail pour nous, nous voulons vivre dans une Amérique meilleure.»
Le syndicalisme fast-food ne peut pas changer la nation du fast-food, mais il peut être une première étape vers un mouvement qui le pourra.
Erik Forman est un organisateur et écrivain ouvrier. Vous pouvez le rejoindre à erikforman (at) gmail.com. Il est sur Twitter au @_erikforman.
Première parution le 5 novembre 2013 comme contenu exclusif de CounterPunch, republié le 17 novembre 2013 sur Recomposition, puis en décembre 2013 dans l’Industrial Workers. Syndicalisme fast-food: la syndicalisation de McDonald et la McDonaldisation des syndicats est publié pour la première fois en français sur le blog de la Section Locale des IWW de Montréal, traduit par Alexis Kelly et Tristan W.

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Appel au Forum 15-5-7

Le Syndicat industriel des travailleurs et des travailleuses – IWW Montréal vous invite à participer à un forum public abordant la lutte pour un salaire minimum de 15$ de l’heure, 5 semaines de vacances et de 7 jours de maladie payés par année.

Celui-ci aura lieu le 12 février 2016 au Centre d’éducation populaire de la Petite-Bourgogne et de St-Henri, au 2515 rue Delisle, à 18h00.

Ce forum proposera un panel où plusieurs personnes présenteront des facettes différentes de cette lutte, soit l’aspect économique, le vécu d’une travailleuse au salaire minimum, une analyse féministe ainsi que l’expérience de cette lutte aux États-Unis. Sur le panel seront présent-e-s :

Minh Nguyen, chercheur à l’IRIS
Morgane M.-Parsons des IWW Montréal
Daniel Kroop de 15NOW (États-Unis)
Jean-Pierre du Centre des travailleurs et travailleuses immigrant-e-s (CTI)
Jacques Fontaine du Syndicat des employé-e-s de la Société du Vieux-Port de Montréal
Kim Bouchard du Mouvement Action-Chômage

Suite au panel, il y aura une période de questions et d’interventions de trente minutes. Après une courte pause, des groupes de discussions se tiendront autour des thèmes suivants :

Travailleurs et travailleuses immigrant-e-s
Femmes et conditions de travail
Travailleurs et travailleuses précaires
Logement et travail précaire
Communautaire et conditions de travail

Ce moment sera l’occasion pour tous et toutes de proposer des actions à mener lors des prochains mois.

Nous lançons cette campagne parce que les conditions minimales de travail ne nous permettent pas de vivre, à peine de survivre. Ces revendications sont essentielles pour n’importe quel-le travailleur ou travailleuse voulant mener une vie décente, payer son loyer, être capable d’élever des enfants et ne pas être pris-e à la gorge dès qu’un imprévu survient.

Si cela ne réglera pas la question de l’oppression du capitalisme sur nos vies, ces revendications vont nous permettre, collectivement, de nous mobiliser et d’aller chercher le minimum que l’on nous doit!

Nous tenons à mentionner que ce forum sera ouvert à tous et toutes.

“Parce que nous valons plus que le minimum!”

Le Syndicat industriel des travailleuses et des travailleurs.

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À New York, des chauffeurs immigrants réclament la dignité et la fin des abus de leur nouvel employeur

Le 7 mars 2012, les chauffeurs de la boulangerie Tom Cat, membres de la campagne Focus on the Food Chain, ont remis une Déclaration de Dignité aux représentants de la compagnie.

[youtube http://www.youtube.com/watch?v=EEeNiHLqoNs&w=560&h=315]

Voir plus de photos de l’évènement sur
la page Facebook de la campagne Focus on the Food Chain

Aimez leur groupe sur Facebook en cliquant ici!

Écrit par Daniel Gross le 9 mars 2012
Publié le 11 mars sur iww.org
Traduit par “travailleurindustriel”

Des membres de Focus on the Food Chain qui travaillent pour la plus grande boulangerie industrielle de la ville de New York ont lancé une campagne le mercredi 7 mars. Celle-ci à pour but d’obtenir le respect des travailleurs puisque les nouveaux propriétaires de l’usine tentent agressivement de dégrader les conditions de travail. Les chauffeurs de l’entreprise Tom Cat Bakery, basée dans le quartier de Queens, sont forcés de travailler sous une administration très abusive et subissent la menace de voir leur assurance-maladie se dégrader de manière importante. Tom Cat Bakery est un important distributeur de pain artisanal pour les nombreux restaurants et détaillants d’aliments spécialisés de la région métropolitaine de New York.

Les travailleurs de Tom Cat Bakery, majoritairement des immigrants latino-américains, se sont rassemblés à Long Island City avec d’autres travailleurs et des étudiants venus les appuyer. Ces derniers font tous et toutes partie de groupes qui sont d’accord avec les revendications des travailleurs de Tom Cat Bakery. Parmi ces groupes on compte le comité de travail “justice pour les travailleurs immigrants” d’Occupy Wall Street, l’Alliance des travailleurs-travailleuses des chaines alimentaires (Food Chain Workers Alliance), les Journaliers Unis de Woodside (Jornaleros Unidos de Woodside), le Centre des Travailleurs-Travailleuses des Blanchisseries (Laundry Workers Center), le Centre des possibilités d’emplois en Restaurations de NewYork (the Restaurant Opportunities Center of New York) et les Travailleurs-travailleuses Domestiques Unis (Domestic Workers United).

Les travailleurs et leurs supporters ont marché ensemble vers l’usine où plusieurs chauffeurs ont lu et remis la Déclaration de Dignité. Celle-ci souligne les attentes qu’ont les travailleurs face à l’administration en ce qui a trait au traitement respectueux des employé-e-s, à une assurance-maladie familiale abordable et à l’équité du traitement pour tous les travailleurs-travailleuses. L’action fut un départ incroyablement inspirant pour la marche des travailleurs-travailleuses de Tom Cat Bakery vers la justice et représente le plus récent effort d’un mouvement grandissant visant à transformer les usines de transformation alimentaire et les entrepôts de distribution.

À New York, le secteur de la transformation alimentaire et de la distribution fourni un gagne-pain à plus de 35 000 travailleurs et travailleuses et à leur famille. Ce secteur reste pourtant de plus en plus caractérisé par un modèle d’affaire qui se base sur des emplois précaires et des traitements abusifs à l’égard de la force de travaille majoritairement immigrante. Focus on the Food Chain est une campagne qui fonctionne sur la base de l’adhésion individuelle des travailleurs et travailleuses de ce secteur. Ceux et celles-ci s’organisent dans le but de promouvoir de bons emplois et un système alimentaire local durable. Cette campagne est un projet conjoint des Brandworkers et des IWW de la ville de NewYork.

Les chauffeurs de Tom Cat ont besoin de votre appui dans leur lutte pour défendre leur dignité, contester les stratégies de l’industrie par actions privées, et créer un système alimentaire basé sur les droits humains plutôt que sur l’exploitation. S’il vous plait restez à l’affut des actions qui seront nécessaires dans le futur. Pour vous impliquer et leur venir en aide, envoyez un courriel à Joseph Sanchez à jsanchez [at] brandworkers.org.

Merci à vous pour tous ce que vous faites qui puisse aller dans le sens des droits humains et de la dignité humaine.

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CKUT Labor Radio | Historian Peter Cole on IWW’s black leader Ben Fletcher, Local 8 and South Africa


Listen to CKUT Labor Radio 12 minutes interview with Peter Cole, or listen to the whole one hour show.

February was Black History Month. For that reason, members of the Montreal IWW helped CKUT Labor Radio‘s host David Tacium to talk with history professor at Western Illinois University, Mr Peter Cole. Mr Cole is the author of Ben Fletcher: The Life and Writings of a Black Wobbly” about the IWW’s most famous black leader Ben Fletcher. Mr Cole also wrote a book called Wobblies on the Waterfront Interracial Unionism in Progressive-Era Philadelphia about the IWW branch Ben Fletcher was involved with : the Longshoremen Union “Local 8” in Philadelphia in 1913.

During the interview, they also talk about the influence of the IWW in organizing black people in South African, a subject Mr Cole is studying now with the aim of writing a next book.

Peter Cole’s two books are available at the Montreal anarchist library L’insoumise on St-Laurent Street. The chapter 4 of Wobblies on the Waterfront, “War on the waterfront”, is also online here.

Read short presentation of Local8 and Ben Fletcher…

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