Wobbly à Dublin – Épisode 2 : Irlande syndicale

Un peu d’histoire

Après plus d’un mois en Irlande, j’en connais un peu plus sur le profil politique du pays, et ce grâce à plusieurs nouveaux contacts. Le 5 octobre dernier, j’ai rencontré un activiste politique de longue date, tel que le laissait paraître le blanc de ses cheveux, qui a eu la gentillesse de me dresser un portrait plus complet de l’histoire ouvrière des dernières années en Irlande et plus particulièrement à Dublin. Tout ce que j’en savais réellement jusqu’à ce jour se limitait au lock-out de 19131, au courant duquel le groupe de cornemuses et tambours St-Lawrence O’Toole, mon petit bonbon, ̶ maintenant apolitique et parmi les meilleurs Pipe bands au monde ̶ a mené une manifestation en jouant de la musique et a confronté la police montée, plusieurs membres ont été blessés et ont vu leurs instruments détruits2. Lire la suite

À ma job

À ma job on est une dizaine d’employé.e.s, pour 4 gérant.e.s et 2 boss. C’est une petite place, au maximum on peut être 5 sur le plancher, mais en général une personne se fait couper avant la fermeture. Ça fait un peu plus de 5 mois que je travaille là. Je ne peux pas dire que j’adore, mais ça fait l’affaire, mes collègues sont géniaux et des fois le tip fait monter la paye de quelques dollars, on crache pas là-dessus.

Ma job c’est un restaurant franchisé et on m’utilise pour combler les trous en cuisine et en service, on peut donc dire que je joue dans les «deux camps» que les travailleurs et travailleuses de l’industrie distinguent sur leur lieu de travail. Dans les faits, les deux camps que moi je constate sur mon lieu de travail, c’est le nôtre ; travailleurs et travailleuses, et le leur ; celui des boss. Lire la suite

Intoxication culture and radical unionism

Pour lire cet article en français, cliquez ici. 

The opinions stated in this article aren't necessarily those of the SITT-IWW and shouldn't be considered as such.

For those who know me, it’ll be no surprise to hear that I consume a lot of marijuana, I am what people call a high functioning user. My consumption and use is intertwined with my self image issues, my social anxiety, and my PTSD. I feel like I need to use before going out and talking to focus my thoughts and not end up being a rambling idiot. I feel like I need to use to make my body acceptable, or at least in my mind, acceptable to society. I spend a lot of money on my self-medication, and I freak out when my means to self medicate is low or gone. This means I have the choice to stop self-medicating and plunge into a plethora of stress and internal anxiety, or forking over the money to keep up my line.

This is a facet of intoxication culture; it is a self-consuming beast that ingests social interactions and forces them to develop under the guise of consuming drugs. In our union, which is mostly conveyed through drinking alcohol, after a meeting we’ll go out for a drink, after a GMB we’ll go out for a drink, after a demo we’ll go out for a drink, we drink a lot, we drink an alarming amount. We spend a lot of money, collectively falling into the pit of intoxication culture, and there isn’t much we do socially that doesn’t include alcohol. Lire la suite

Culture de l’intoxication et syndicalisme radical

Note: Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur-e et ne doivent pas être considérées comme des positions officielles du SITT-IWW.

Ceux et celles qui me connaissent ne seront pas surpris et surprises d’apprendre que je consomme beaucoup de marijuana, je suis ce qu’on appelle un utilisateur fonctionnel élevé. Ma consommation est liée à mes problèmes d’image personnelle, mon anxiété sociale et mon trouble de stress post-traumatique. Je sens que j’ai besoin d’en consommer avant de sortir et de parler pour concentrer mes pensées et ne pas être un imbécile incohérent. Je sens que j’ai besoin de consommer pour rendre mon corps acceptable du moins dans ma tête pour la société. Je dépense beaucoup d’argent sur mon automédication et je panique lorsque mes moyens d’automédication sont bas ou épuisés. Ça veut dire que j’ai le choix entre arrêter de m’automédiquer et plonger dans une profusion de stress et d’anxiété interne, ou alors de casquer pour continuer.

Ceci est une facette de la culture de l’intoxication; c’est une bête qui se consume elle-même et qui avale les interactions sociales et les force à se développer dans le contexte de consommation de drogues. Dans notre syndicat, c’est principalement porté par l’alcool; nous allons prendre un verre après une réunion, nous allons prendre un verre après une réunion de branche, nous allons prendre un verre après une manif, nous buvons beaucoup, nous buvons une quantité alarmante d’alcool. Nous dépensons beaucoup d’argent, ce qui nous plonge collectivement dans le trou de la culture de l’intoxication, et nous faisons peu socialement qui n’inclut pas d’alcool.

Non seulement cela crée des espaces très peu sécuritaires, mais ça rend aussi inaccessible à ceux et celles qui ont fait le choix de ne pas boire ou qui ne le peuvent pas de sympathiser avec nous.

Écoutez, je n’essaie pas de casser le party. Parmi tous, je suis le premier à prendre quelques pintes après une longue réunion. Je suis le premier à consommer. Je fais partie de ce cycle, je vis dans la bête, j’ai eu un long passé à tourner les coins ronds pour me geler, j’ai séché le travail, planté des ami-e-s, laissé tomber des responsabilités pour continuer à consommer, en partie à cause de tout ce que j’ai mentionné, mais aussi parce que je me sentirais seul et incapable de faire face à mes responsabilités une fois sobre. C’est quelque chose avec quoi je lutte toujours, et j’ai tourné tellement de coins ronds que le gros de mon travail finit par ressembler à un cercle.

Lorsqu’une organisation de personnes nourrit cette machine, nous changeons, nous avons des standards plus bas, nous nous abandonnons à la bête et tout ce que nous faisons deviens assujetti à l’intoxication. C’est la différence entre accomplir quelque chose et accomplir quelque chose pour pouvoir aller boire. À mon avis, nous sommes meilleur-e-s que ça. Ça veut dire qu’aussi forts et fortes que nous sommes, aussi critiques que nous sommes, nous sommes toujours des esclaves à la boissons et au pot, et je crois que nous sommes bien meilleur-e-s que ça. Je n’ai pas les réponses à ce problème, j’ai mes propres démons, mais ensemble, y’a rien qu’on puisse pas faire.

– Harvest.

Pensez-y (partie 1)

Ce qui suit est la première partie d’un texte de pamphlet d’introduction écrit par un camarade travailleur membre de la section IWW de Portland, Oregon, Tim Acott. Text in English here.

La Solidarité

Dans l’économie d’aujourd’hui les travailleurs et travailleuses n’ont qu’une véritable option : résister de toutes leurs forces au programme d’accroissement de pauvreté qui leur est imposé par les grandes entreprises. Pour la première fois dans l’histoire moderne, les profits augmentent tandis que les salaires et avantages baissent. Dans le passé, les deux ont toujours été liés, même si c’était de manière inégale. Mais la donne a changé. Un appauvrissement de pire en pire est en vue si nous ne nous soulevons pas contre ce courant. Les conditions que nous voyons aujourd’hui en Asie et en Amérique centrale sont une bonne indication du futur de nos propres vies de travail dans les “Démocraties occidentales.” Lire la suite

Bâtir le pouvoir ouvrier au Royaume-Uni

Original article in English.

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Il y a quelques mois, New Syndicalist (un groupe de Wobblies originaire du Royaume-Uni qui écrit des textes à propos de théories et stratégies anticapitalistes et autogestionnaires) fut approché par Workers’ Power, une section du journal Industrial Worker, afin de rédiger un texte réflectif sur la croissance récente du IWW au Royaume-Uni. Ceux qui nous ont suivis sur les médias en ligne savent que nous avons franchi un cap important cette année, avec une adhésion qui dépasse désormais les 1000 membres. Nous avons célébré ce nombre important à notre conférence annuelle de Bradford, Angleterre. Un membre plus ancien se souvient avoir participé à la conférence de 2005, dans la même ville, où seulement sept membres étaient présents. En 2015, la plupart des délégations de sections étaient plus nombreuses.

Nous avons témoigné d’une croissance fantastique de notre adhésion lors de la dernière décennie, en particulier dans le cas de certaines sections plus larges qui comptent maintenant entre 100 et 300 membres. Qu’est-ce que cela implique d’avoir des sections aussi populeuses, et comment se sont-elles bâties ? Telles étaient les questions clés qui nous étaient posées. Ce sont évidemment de grandes questions, qui n’offrent en aucun cas de réponses simples, particulièrement lorsque vient le temps de conter le travail dévoué et patient des organisateurs et organisatrices du IWW dans tout le pays au cours des dix dernières années. Néanmoins, après une réflexion collective à New Syndicalist, nous avons décidé de nous concentrer sur cinq facteurs que nous considérons comme les plus importants, afin de soutenir la croissance de nos sections dans le Nord (où nous sommes situés), dont certaines ont doublé de taille au cours de la dernière année.

Cette liste ne se veut en aucun cas exhaustive, et certain-e-s Wobblies plus expérimenté-e-s pourraient avoir l’impression que ces conseils sont redondants, reconnaissant plusieurs concepts de base qui se trouvent déjà intégrés dans les programmes de formation d’organisateurs et organisatrices. Nous présentons toutefois cette réflexion en espérant inspirer la solidarité, le dialogue ouvert et un débat rehaussé.

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Pourquoi je marche le 1er mai

À l’époque Mathieu travaillait encore à la Station des Sports et avait donc préféré limiter la circulation de sa lettre à son cercle restreint d’ami-e-s et de connaissances. N’étant plus employé de la Station des Sports et de Placement Sergakis Inc. et faisant face à une résistance de leur part à lui donner sa paye de vacances, alors même que la date-butoir pour le paiement des loyers approche, nous avons jugé adéquat de republier cette lettre ici.

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Je ne me rappelle plus quel groupe communautaire expliquait la vie sous le seuil de la pauvreté comme une partie de jeu de Serpents et échelles: il est possible de gagner, mais on est toujours à un jet de dés de retourner à la case départ. Une journée de maladie, une contravention, un tour chez le dentiste ou le vétérinaire, un cellulaire qui brise ou un noël où l’on se sent trop généreux et on est reparti pour des mois à pédaler pour retrouver une situation financière confortable. Juste dans la dernière année, outre ces dangereux petits aléas de la vie, j’ai aussi eu droit à une mise à pied et des coupes dans mes heures – on commence à se rapprocher, la vie à un jet de dés de la chute et moi. La vie avec un seul pantalon pis des runnings usés à la corde aussi. Lire la suite

Whole Foods, icône du «capitalisme conscient», exploite le travail carcéral

Par Ben Norton – publié dans CounterPunch, 17 juillet 2015 (Original article in English)

Note: Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne doivent pas être considérées comme des positions officielles du SITT-IWW.

Le PDG de Whole Foods John Mackey, dont la fortune personnelle est estimée à plus de 100 millions de dollars, est un véritable apôtre du «capitalisme conscient.» S’estimant ‘libertarien’, Mackey soutient que la solution à tous les maux du monde est de libérer les corporations de tout contrôle. Il y croit si ardemment qu’il a écrit un livre entier faisant les louanges des vertus du marché libre.

En même temps qu’il prêche l’évangile salutaire du «capitalisme conscient», l’entreprise de Mackey Whole Foods, qui dispose d’un revenu annuel en croissance de 13 milliards de dollars, vend à prix exorbitant du poisson, du lait et des fromages provenant du travail des détenu-e-s de prisons aux États-Unis. Lire la suite

Les dilemmes de nos temps

Ce billet est une traduction d’un texte publiée par la branche grecque de l’Industrial Workers of the World en vue du référendum sur le remboursement de la dette grecque qui a eu lieu dimanche le 5 juillet 2015. La version originale du texte est disponible ici

L’appel au referendum par le « tout premier » gouvernement de gauche était le résultat naturel d’une politique de négociations futile qui visait à « conserver le beurre (le capital) et l’argent du beurre » (satisfaire ses besoins et ceux des institutions). Pour s’en assurer, le cadre des négociations aura exclu complètement ceux et celles qui devront payer le prix de demeurer dans l’Europe, qu’il soit en Euros ou en drachmes, soit la classe ouvrière, les sans-emplois, les travailleurs et travailleuses précaires, les immigrant-es et les bénéficiaire de pensions de retraite. Malgré le discours de dignité adopté par le gouvernement de gauche, ce processus est un chantage à sens unique. Nous avons besoin d’un changement de paradigme radical, non pas en paroles, mais en action.

Dans les circonstances actuelles, les travailleurs et travailleuses n’ont qu’un seul choix.  Nous devons nous unir, de toute notre force, contre les grands intérêts qui tentent de nous trainer dans la misère.  Le futur sera sombre, et les peuples souffriront de dépossession si nous ne ripostons pas contre ce funèbre destin que l’on tente de nous imposer.   Nous n’avons qu’un seul espoir si nous voulons espérer combattre ce raz-de-marée de maux et misères. Cet espoir, cet outil, c’est notre solidarité. Chaque travailleur et travailleuse doit supporter les intérêts de sa classe, peu importe où il ou elle habite, peu importe son origine, son sexe, son genre ou son âge. Notre unité sera primordiale. Une perte pour un travailleur ou travailleuse est une perte pour tous et toutes, et chacun des gains de la classe ouvrière est un gain pour tous et toutes.

Le gouvernement sert et servira toujours les intérêts de la classe dirigeante.  Nous croyons que le gouvernement est déterminé à agir de la sorte, maintenant plus que jamais tandis que les travailleurs et travailleuses réclament leurs droits. Et ce, malgré les miettes occasionnelles que le gouvernement nous offre afin de berner notre jugement et d’adoucir notre détermination. Une certitude nous guette :  la brutalité de l’État, son oppression par  les forces de l’ordre et les sombres cellules de prison. L’action directe, de concert avec la solidarité, seront les clés de notre succès.

Il n’y a donc aucun dilemme. « La classe ouvrière et la classe dirigeante n’ont rien en commun ». Ce sont les mots du préambule de la constitution du S.I.T.T.-I.W.W.! Le même principe s’applique lorsque nous nous rabattons sur l’État, les gouvernements et l’autorité en général, quelle que soit son origine. Il s’agit d’une flagrante vérité, dictée par la logique, et il serait contre nos intérêts de l’ignorer.

Nous pouvons y arriver! Éduquer, organiser et émanciper; tels sont les trois objectifs  gravés dans les trois étoiles du logo du S.I.T.T.-I.W.W. Éduquer, en commençant par nous-mêmes ainsi que nous collègues de travail. S’organiser nous-mêmes et nos  camarades.  S’émanciper en tant que classe, dans l’adversité, la guerre, et en harmonie avec la Terre qui nous nourrit et nous abrite.

Le capitalisme ne peut être amélioré – Il doit être dépassé! Le même principe s’applique pour tout gouvernement.

 Faisons la Grève Générale maintenant!