Articles

La PCU et les vrais fraudeurs

Au moment d’écrire ces lignes, le Globe and Mail venait de dévoiler que le gouvernement fédéral rédigeait un projet de loi pour punir les « fraudeurs » à la Prestation canadienne d’urgence, la fameuse PCU mise en place pour aider les millions de personnes se retrouvant soudainement sans emploi avec la pandémie.

Probablement que les montants et peines possibles vont changer selon l’opinion publique et s’il y a une levée des boucliers, mais le projet de loi actuel fait référence à « une amende de 5000 $ ainsi qu’une seconde amende du double du montant empoché. Ce brouillon [de projet de loi] prévoit également la possibilité d’une peine de prison « de six mois ou moins » pour les coupables ».

Encore une fois c’est la classe ouvrière qui va écoper pis je vous explique pourquoi.

Premièrement, pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté (et pour couvrir nos arrières), je n’encourage personne à faire de fausses déclarations. Que ce soit à la PCU, au chômage, à l’aide sociale, name it. Les chances de se faire attraper sont assez élevées et légalement, c’est être du mauvais côté de la loi. Ensuite, je ne lancerai de roche à personne qui en arrache et qui a besoin de cash, qu’on me comprenne.

Cependant, d’une part, plusieurs de ces « fausses déclarations » à la PCU n’auront pas été faites de mauvaise foi. Pourquoi? Parce qu’initialement, les messages adressés à la population laissaient quasiment croire que tout le monde y avait accès. Et les « erreurs administratives » auront été nombreuses. Le nombre de personnes ayant reçu des montants plus gros, en double, sont significatifs.

Aussi, on me dira que certains « fraudeurs » avaient déjà accès à l’aide sociale, par exemple. Well, avec un montant dérisoire comme celui accordé par l’aide sociale, je me vois bien mal dire à une personne qu’elle doit se contenter de quelque 670$ par mois, alors que le gouvernement a établi le montant de la PCU à 2000$ par mois en considérant que c’est le minimum requis pour subvenir à ses besoins. Comme si les prestataires d’aide sociale soudainement vivent bien avec un montant 3 fois moindre et joignent les bouts miraculeusement.

En plus, soyons honnêtes, les personnes qui auront obtenu la PCU de manière illégale sont rarement des personnes riches. On ne parle pas d’une personne ayant des revenus phénoménales. Et c’est sans compter que nombre de travailleurs et travailleuses sont d’emblée éliminé-e-s de l’équation : les sans-statut, les personnes dans l’industrie du sexe, etc. Pas de revenu déclaré, pas de PCU.

Deuxièmement, un autre argument sera de dire que « oui mais c’est pas honnête », ou que « ça aura coûté une fortune en fraude aux payeurs de taxes ». Je veux bien, mais pour le nombre de choses malhonnêtes et qui ont réellement un impact négatif sur notre société en général, on met rarement autant de moyens en place pour en punir « les coupables ». Je m’explique. Là, on prépare le terrain pour une véritable chasse aux sorcières.

Par contre, à combien de reprise les différents paliers de gouvernement ont injecté des sommes faramineuses pour « aider » des compagnies privées qui pourtant « shippent » leur production à l’étranger tout en octroyant des gros bonus juteux à leurs cadres et PDG. On peut penser à Bombardier, ce « fleuron » de l’économie québécoise. Ce sont des milliards investis et qui au final profiteront surtout à une poignée de gens qui veulent maintenir leur rythme de vie effrénée.

Ou mieux encore. Chaque année, ce sont plus de 25 milliards $ qui sont perdus dans les paradis fiscaux. Et nous connaissons les compagnies et personnes qui en profitent, qui ne payent pas leur juste part. Est-ce qu’on leur prépare un projet de loi pour les traduire en justice? Fuck all. Plus, en avril, en début de pandémie, le gouvernement fédéral annonçait même que les compagnies connues comme ayant des comptes dans des paradis fiscaux pourraient profiter des aides de l’État malgré leurs activités illégales.

25 milliards dans les paradis fiscaux, ça en paye en sacrament des mois de PCU, des prestations d’aide, des services publics, des soins de santé, des programmes communautaires, etc.

C’est donc de dire que tandis que le gouvernement fédéral prépare sa chasse aux pauvres et aux précaires, les vrais fraudeurs continueront à se la couler douce.

  • Un membre du IWW-Montréal

COVID-19 : L’IWW-Montréal demande la suspension des paiements de loyers et d’hypothèques

MONTRÉAL, le 30 mars 2020 – La crise du coronavirus nous a frappé de plein fouet et comme à l’habitude dans ces moments difficiles, les premiers à en payer le prix furent les travailleurs et travailleuses. Une semaine seulement après le début des mesures d’isolement social, on dénombrait plus d’un million de nouvelles chômeuses et de nouveaux chômeurs à travers le pays.

Malgré les programmes d’aide annoncés par les différents de paliers de gouvernement, il semble que les fonds ne seront pas distribués à temps pour le début du mois d’avril. C’est ainsi que plusieurs centaine de milliers de personnes devront choisir entre manger ou payer son loyer ou son hypothèque. Si les mesures de confinement prises le sont pour la santé de tous et toutes, nous croyons important de rappeler que le logement et l’alimentation constituent également des besoins vitaux et devraient être considérés comme des droits humains.

En ce sens, l’IWW-Montréal demande la suspension des paiements de loyers et d’hypothèques pour tous et toutes. La porte-parole du syndicat, Coline Gaucher explique : « Si, à la base, nous avons déjà un certain malaise avec le fait de monnayer un besoin humain de base comme celui de se loger, cette situation exceptionnelle nous force à exiger que les gouvernements prennent des mesures extraordinaires. C’est aussi ça, la santé publique ! »

Solidarité avec les grévistes du loyer

Comme l’État tarde à mettre en place des mesures concernant le droit au logement pour tous et toutes durant cette crise, un mouvement de grève des loyers est en train de se mettre en place d’un océan à l’autre. L’IWW-Montréal tient à annoncer publiquement qu’elle se place en solidarité avec les locataires grévistes, et que ceux et celles qui devront subir des conséquences négatives de la part de leur propriétaire pourront contacter notre Comité de solidarité pour les aider à se défendre.

« Nous soutiendrons nos membres, ainsi que toute personne qui subira les conséquences d’une participation à cette grève des loyers, par nécessité ou par solidarité. Soyez assuré.e.s que notre syndicat répondra présent si des mesures de répression sont exercées par les propriétaires ! » indique madame Gaucher.

L’IWW-Montréal enjoint également ses organisations alliées à prendre des positions de principe sur la suspension des hypothèques et des loyers pendant la crise, à faire pression sur les différents paliers de gouvernement, ainsi qu’à préparer la solidarité avec les personnes qui devront se résoudre à faire la grève des loyers. Il n’y a pas de recette secrète, c’est en unissant que nous réussiront à défendre les droits au logement et à l’alimentation pour l’ensemble de la classe ouvrière, avec ou sans emploi.

Toujours du côté de celles et ceux qui luttent

Le Syndicat Industriel des Travailleurs et des Travailleuses – Industrial Workers of the World (SITT-IWW) est une organisation syndicale ouverte à tous les membres de la classe ouvrière, qu’ils ou elles soient salarié.e.s, sans-emploi, étudiant.e.s ou retraité.e.s.

La mission du SITT-IWW est d’organiser les lieux de travail, les industries et les communautés. Nous voulons à la fois améliorer nos conditions de vie dans l’immédiat, mais aussi construire un monde sans patrons. Un monde dans lequel la production et la distribution seront gérées et organisées par les travailleurs et les travailleuses, afin que les besoins de la population entière soient satisfaits plutôt que seulement ceux d’une puissante minorité d’exploiteurs et de propriétaires.

Crédit Photo: Cédric Martin
,

Covid-19: Le communautaire sans plexiglas

Si vous avez pris le métro de Montréal ces derniers jours, vous êtes pour un grand nombre un.e prolétaire. Vous êtes cuisinier/cuisinière, caissier/caissière, préposé.e. à l’entretien, manufacturier/manufacturière, emballeur/emballeuse, commis/ise, serveur/serveuse dans un fast food, bref, vous faites partie de ces travailleuses et travailleurs qui ne peuvent s’isoler car vous êtes essentiel.le.s au fonctionnement de la société. Il est aussi possible que vous soyez des travailleuses et travailleurs de la santé et services sociaux, ou, comme nous, des travailleuses et travailleurs du secteur communautaire, dont des intervenant.e.s services de première ligne. Nous intervenons auprès des personnes parmi les plus vulnérables de notre ville.

Travaillant pour des organismes en réduction des méfaits, défense collective des droits, ressources d’hébergement de toutes sortes, centres pour migrant.e.s ou encore dans un drop-in, nous sommes aux premières loges et, bien malgré nous, des dommages collatéraux de cette pandémie qui frappent en particulier les personnes utilisant nos services.

Cette crise sanitaire affirme violemment les inégalités sociales de notre monde. D’abord, les personnes que nous accompagnons courent un grand risque d’être infectées car beaucoup d’entre elles elles ne peuvent s’isoler et continuent de circuler au centre-ville de Montréal. D’autres, sont effectivement isolées dans leur logement, mais sans possibilité de voir leur travailleur/travailleuse de rue ou leur intervenant.e qui joue un rôle central pour briser leur isolement habituel. Certaines ne trouvent plus l’argent pour se nourrir ou pour consommer provoquant une hausse des sevrages et de la violence dans la rue. On demande à des personnes sans maison de s’isoler, à des personnes victimes de violence conjugale de rester chez elles, aux personnes ayant l’habitude de quémander d’éviter les interactions sociales, aux personnes sans carte de crédit d’utiliser leur carte de crédit… Vous comprenez que pour ces personnes, il est impossible de respecter ces mesures préventives. Ces personnes ne peuvent se protéger de la pandémie et des répercussions sociales qui en découlent.

Ce sont donc nous, travailleuses et travailleurs du communautaire, qui doivent jongler avec les impacts des décisions (ou absence de décision…) de l’État. C’est d’accoutumée pour nous. Véritable cheap labor de l’État, nous sommes le dernier filet sur lequel comptent ces personnes. Dans le contexte actuel, cela est encore plus évident.

Nous prenons nous aussi des risques, et ce, sans plexiglas. Nous sommes là, fidèles au poste, avec des salaires et des conditions de travail grandement inférieurs à ce que nous pouvons observer pour des postes aux fonctions similaires du secteur public. Certain.e.s d’entre nous ont des enfants, sont des aidants naturels, ou encore vivons avec des conditions médicales qui nous mettent à risque. Nous serons dans les semaines à venir fort probablement en contact avec la COVID-19. C’est Horacio, le directeur de la santé publique qu’il l’a dit.

L’idée n’est pas de mesurer la souffrance de chacun.e. Nous sommes nombreuses et nombreux au front, à prendre des risques pour que la nourriture soit placée sur les tablettes ou pour qu’une personne aille un endroit sécuritaire pour s’injecter. C’est donc toute la société qui bénéficie de notre travail. Nous sortons de nos appartements pour le bien commun et rentrons le soir s’isoler pour le même objectif.

Tout s’écroule et ceux qui continuent à tenir la société, ce sont les prolétaires, travailleuses et travailleurs du communautaire, travailleuses et travailleurs de toutes les industries.

Notre travail est méconnu et invisible, mais si vous prenez le métro de Montréal dans les prochains jours, essayez de saluer votre camarade… en gardant un deux mètres de distance, bien sûr.

Les membres du Syndicat des travailleuses et travailleurs du communautaire du SITT-IWW.

Crédit photo: Cédric Martin