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Syndicalisme, communautaire et journée de réflexion

Lendemain de la Journée internationale des travailleurs et travailleuses

Le 2 mai dernier, une journée de réflexion sur les conditions de travail dans le communautaire était organisée par les organismes Au bas de l’échelle, le Centre de Formation populaire ainsi que le Regroupement intersectoriel des organismes communautaires de Montréal (RIOCM).

Nous étions trois membres du comité communautaire des IWW Montréal à y assister. Ce fut une journée intéressante et bien organisée. Il y a eu matière à brasser des idées avec plus d’une centaine de personnes. Nos félicitations au passage à l’organisation. Plusieurs propositions ont été mises de l’avant; nous allons en mentionner quelques-unes, en expliquant les pour et les contre, ainsi qu’émettre certaines critiques que nous espérons constructives.

 

Contexte

Trois ateliers encadraient les discussions : les conditions de travail, la conciliation travail-vie personnelle et le milieu de travail. Les enjeux soulevés ont été principalement le manque de financement (majoritairement), le surmenage, les burnouts, le gros roulement de staff, la culture du martyr, le peu de liens des salarié-e-s avec leur conseil d’administration, le sexisme sur les lieux de travail, la bureaucratisation, le financement par projet (et donc la précarité), etc.

Ce sont, somme toute, des problèmes que la plupart d’entre nous qui travaillons dans le communautaire avons déjà constaté et qui pèsent sur nos épaules au quotidien.

Avant d’aller de l’avant, un petit aparté est nécessaire pour expliquer le contexte des discussions. Nous l’avons dit, une bonne centaine de personnes étaient présentes. Cependant la majorité de ces personnes étaient soit à des postes de direction, à la coordination avec un pouvoir d’embauche et de renvoi ou bien membre de conseil d’administration. C’est donc dire que nous parlions de nos conditions de travail avec des boss. Des boss visiblement soucieux de leurs salarié-e-s (et qui subissent eux-mêmes et elles-mêmes certains des enjeux discutés), mais des boss tout de même. Et les discussions en ont été teintées.

Également, pour être clair : les réflexions et critiques que nous apportons ici sont les nôtres, celles de syndicalistes.

 

Vocation versus emploi

Plusieurs personnes l’ont évoquée : il existe une culture du martyr au sein des organismes communautaires. Celle de ne pas compter les heures supplémentaires, d’accepter des conditions souvent précaires, et ce, sous prétexte que notre travail en est un de care. On travaille avec du monde précaire et souvent magané, notre travail est essentiel. Un peu le même discours que l’on sert aux infirmières et aux métiers dits féminins. Un hasard? Probablement pas. On dit également souvent du communautaire qu’il s’agit d’un travail ‘’militant’’. La frontière entre militantisme et travail n’est pas toujours clairement définie. Il est fréquent de voir des personnes se surmener au travail sur cette base, que la ‘’cause’’ mérite une couple d’heures supplémentaires non payées!

Des propositions intéressantes sont ressorties. Déconstruire ce discours premièrement. Expliquer la nature de nos emplois, de dénoncer ces situations de surmenage, comme justement les travailleuses de la santé le font depuis des mois avec force, que ce soit via des textes publics ou des vidéos. Refuser d’en faire davantage (avec de moins en moins de moyens).

Une expression est ressortie cependant à plusieurs reprises de la bouche de directeurs ou directrices d’organismes, soit le besoin de « sensibiliser leurs employé-e-s à l’overtime ». Façon de remettre la faute de l’overtime sur les épaules des employé-e-s, mais ni sur les directions ni sur la structure des organismes, et encore moins sur les bailleurs de fonds. Si les employeurs acceptent les exigences de rendement qu’imposent les bailleurs de fonds, tout en nous sachant souvent « low staff », il est inconséquent de demander aux salarié-e-s d’offrir les mêmes services, mais en moins de temps.

 

Financement, bureaucratisation et paperasse

Évidemment, l’enjeu principal demeure : le sous-financement et le financement par projet. Quelques personnes ont évoqué la possibilité de faire pression sur les partis politiques dans le cadre des campagnes électorales. Tenter de nouveau de faire une grève du communautaire, avec peut-être des objectifs plus clairs et de manière décentralisée que celle avortée du 7 février dernier. Et de ratisser plus large et d’en parler davantage. Mais surtout de mobiliser une des bases mêmes des organismes : soit les salarié-e-s!

[À ce sujet, une anecdote personnelle et un parallèle avec la Journée de réflexion : à ce jour, très très peu d’employé-e-s d’organismes avec un mandat de santé et services sociaux (telle la prévention des ITSS) à qui je parle avaient entendu parler de cette grève manquée du 7 février dernier. Tout comme peu de mes collègues en intervention avaient entendu parler de cette journée de réflexion sur nos conditions de travail. Visiblement, si ce sont les coordos ou directions qui reçoivent une invitation à parler des conditions de travail du milieu, il y a peu de chance que ça se transmette aux employé-e-s. Imaginez alors parler de faire grève…]

Pour ce qui est des enjeux de précarité liés au financement par projet plutôt qu’à la mission, peu de solutions ont été mises de l’avant, outre d’en faire une revendication de grève. Nous avons mentionné à quelques reprises de s’attaquer à certains bailleurs de fonds privés comme Centraide, qui participent activement à cette culture entrepreneuriale, mais personne n’a repris la balle au bond, ce qui en soit en dit long sur le manque d’analyse que nous avons de notre propre « industrie » de travail.

 

Se faire entendre en tant que travailleuses et travailleurs

Une annonce a été faite, à savoir qu’une association nationale de travailleuses et travailleurs du communautaire serait créée dans les prochains mois. Peu de détails ont été dévoilés. Comme son assemblée de création n’a pas eu lieu, il est difficile de dire quel sera son mandat, mais nous pouvons soupçonner qu’il s’agira de faire valoir nos droits, de revendiquer un meilleur financement, etc.

En posant quelques questions dans les semaines suivantes à des personnes impliquées dans sa création, nous avons certaines réserves, voire inquiétudes, mais le projet nous intéresse malgré tout.

Déjà, avoir un espace où proposer des actions, où échanger et parler de nos conditions de travail est en soi intéressant. De pouvoir se regrouper est quasiment un luxe, considérant toutes les tâches qui nous incombent et nous pèsent. Ce sera certainement un projet dans lequel il pourra s’organiser des actions concernant les métiers que nous faisons.

Cependant, quelques inquiétudes demeurent. Premièrement, qui pourra en faire partie? Est-ce que seront qualifié-e-s de travailleurs et travailleuses les personnes qui ont des pouvoirs d’embauche et de renvoi au sein de nos organismes? Supposons qu’on se met à parler de syndicalisation, allons-nous faire face à un groupe interne qui s’y opposera farouchement? Ou simplement à parler d’autogestion, de conflits internes, de rapports de pouvoir au sein de nos organismes… Parlera-t-on de conditions de travail ou seulement de sous-financement de manière générale? La question se pose.

 

Syndicalisme de solidarité et autogestion

Évidemment, nous avons prêché à plusieurs pour des solutions qui nous ressemblent. Contre une certaine frilosité à se syndiquer sous un modèle traditionnel, nous avons parlé de mettre de l’avant un syndicalisme de solidarité. À savoir se mobiliser, nous la base, par et pour nous-mêmes, de manière à non seulement parler de sous-financement, mais également à remettre au goût du jour l’autogestion au sein des organismes communautaires dans lesquels nous travaillons. Mais aussi pour pouvoir aborder des sujets comme le harcèlement, les rapports employé-e-s versus directions/conseils d’administration, etc. C’est pourquoi notre syndicalisme se fait sur une base volontaire, pour permettre aux gens de se faire entendre selon leurs besoins.

Nous avons mentionné l’importance de ne plus rester impassibles lorsqu’un organisme se fait couper. Et je crois que cet objectif demeurera pour nous un de nos mandats principaux : faire valoir la solidarité au sein des personnes qui travaillent dans le communautaire. Parce c’est ensemble que nous avons un rapport de force et que nous pouvons protéger nos organismes.

 

Conclusion

En somme, ce fut une rencontre intéressante. Nous espérons qu’elle ne sera pas qu’un exercice isolé et qu’elle sera suivie d’une réflexion plus générale et plus large. Les organismes qui l’ont organisée ont entamé quelque chose d’important, nous espérons que ça se poursuive et que des suites lui soient données.

La rencontre fut somme toute à l’image du communautaire : nous connaissons  bien les problèmes que nous vivons, nous avons une bonne idée des solutions à notre portée, mais le passage à l’action est nébuleux, voire incertain.

Quoi qu’il en soit, de notre bord, nous apporterons toute l’aide que nous pourrons à nos collègues du milieu, et nous les invitons à nous contacter. Plus nous serons nombreuses et nombreux, plus notre voix portera.

 

An injury to one, an injury to all!

 

Des membres du Syndicat des travailleuses et travailleurs du communautaire.

Entrevue ouvrière: Une gréviste de la SAQ est en tabarnak!

Les employé-e-s de la SAQ (Société des alcools du Québec) se sont doté-e-s d’un mandat de grève de 6 jours pour faire pression sur la société d’État dans le cadre de leur négociation. Un membre du IWW a posé quelques questions à une camarade du SEMB-SAQ (CSN) à propos de leur grève. Pour éviter les représailles de l’employeur, son nom demeurera anonyme. Solidarité!

 

Rapidement, peux-tu nous en dire un peu sur ton background? Est-ce que c’est ta première grève?

 

Je suis une employée de la SAQ depuis presque dix ans, avant cela, j’avais travaillé dans une urgence du CHUM dès mes 18 ans. 2012 fut ma première lutte, maintenant je me bats comme employée à la SAQ.

 

Pourquoi vous êtes en grève, c’est quoi vos revendications?

 

À date, nous avons utilisé une seule de nos 6 journées de grève perlée** et ce fut le mardi 17 juillet 2018 comme plusieurs ont pu le constater. Nos revendications principales sont les suivantes : la réduction de la précarité d’emploi au sein de nos membres et la conciliation travail-famille. Ce qu’il faut savoir est que 70% de nos employé-e-s sur 5500 sont des employé-e-s à temps partiel qui n’ont pas d’assurance, pas de vacances payées, pas de journée de congé payée, pas d’échelon salarial et pas d’heure garantie à l’horaire semaine après semaine.

Ils et elles reçoivent leurs horaires trois journées à l’avance et cela crée une « surembauche » et un roulement de personnel, car on ne peut pas garder des travailleurs et travailleuses dans ces conditions-là. Il faut aussi mentionner que ça prend entre 10 à 15 ans pour obtenir un poste. On se fait dépeindre par la population comme des enfants gâté-e-s parce que notre salaire à l’embauche est de 19,33$ de l’heure, mais si on le multiplie par 0 pendant 3 mois d’affilée, ça reste une multiplication de base qui donne 0$ en salaire. En gros, la SAQ n’arrive pas à garder les employé-e-s, et ce, même avec un salaire qu’on pourrait qualifier d’alléchant parce qu’elle ne peut pas garantir d’heures.

Notre autre revendication est la conciliation travail-famille et je pense que je n’ai pas de besoin d’élaborer trop sur ça, c’est pas mal évident. Sérieux, le gouvernement Couillard en a fait sa campagne, mais faut croire que ce n’est pas pour nous vu qu’il envisage de nous privatiser. Si déjà, il faut entre 10 et 15 ans pour avoir un poste à la SAQ, ça serait cool d’avoir un horaire qui comporte aucune ou une seule journée de fin de semaine. On veut garder le plancher des horaires de notre présente convention et/ou l’améliorer, mais quand ton employeur refuse même le statu quo, on se rend compte que malgré ses profits records, il s’en crisse de nous. Si j’obtiens un poste après 13 ans et que je veux espérer avoir une qualité de vie avec ma famille, ça ne sera pas à la SAQ, donc je me bats!

 

Les boss de la SAQ sont comment? Les cadres vous disent quoi?

 

Par où commencer? En gros, leur système de bonification se fait sur le dos des travailleurs et travailleuses. Plus ils coupent des heures et plus leurs bonis s’avèrent alléchants. Donc, ça ne vaut pas la peine d’en parler vraiment. Mon opinion est la suivante, j’ai étudié en relations industrielles parmi une panoplie de gens qui pensent que lorsqu’ils vont arriver dans une entreprise, ils pourront faire preuve de « leadership », c’est cute.

 

Vous faites quoi comme actions?

 

Au départ, nous avons commencé par enlever l’uniforme, mais ça n’a pas fait réagir la population. Par contre, le début des moyens de pression, qui ont été votés à 94.7%, a eu pour effet de changer le rapport de force. C’était par des actions en gradation que nous faisons comprendre à l’employeur qu’on se tient. Nous sommes 5500 membres partout au Québec et ils sont 350 et quelques gestionnaires de succursale. Ils nous trouvaient fatigant-e-s de nous voir arriver au travail, habillé-e-s comme on le voulait et qu’ils n’étaient plus reconnus comme figure d’autorité.

Après, nous avons fait une campagne de collants qui n’a jamais été demandée par notre table de négo et ni par l’exécutif. Je pense que c’est important de le mentionner pour dire à l’employeur que c’est un mouvement autonome des membres du SEMB qui a pris de l’ampleur, car nous avons été insulté-e-s par le manque de reconnaissance de l’employeur, donc ils devraient oublier leurs mises en demeure! Il faut aussi dire que certains de nos client-e-s nous ont demandé des collants afin de les apposer à l’intérieur ou à l’extérieur du magasin. Ce genre d’action de la part de ceux-ci nous a démontré qu’ils nous aiment et que ce ne sont pas les travailleurs et travailleuses qui sont dans le tort, mais bien les hauts dirigeants du monopole.

En ce moment, on fait du « facing » alternatif, on tourne le devant des bouteilles, on met à l’envers les pancartes et on se rend indispensable avec la clientèle. Puis le reste, ça reste un secret.

 

Le piquetage se passe comment?

 

Après une journée, ça s’est très bien passé parmi nos rangs. Les membres ont répondu à l’appel de façon extraordinaire. On s’est rendu compte, peu de temps avant le commencement de la grève, que l’employeur allait opérer les petits magasins, dont les SAQ Express.

Par-contre, les gens ont gardé le mot d’ordre : empêcher les livraisons! La réponse de nos membres fut incroyable.

Cependant, nous avons vu des gens de nombreux syndicats qui portaient des vêtements identifiés avec les couleurs desdits syndicats franchir nos lignes de piquetage, et ce, sans aucune honte. Le SEMB-SAQ est connu pour appuyer toutes les luttes des collègues syndiqué-e-s! Je ne mentirai pas, mais ça me met en tabarnak lorsqu’un/une syndiqué-e passe nos lignes de piquetage lors d’une SEULE journée de grève pour acheter du vin. C’est comme si nous membres du SEMB-SAQ ne valaient rien pour eux. Je leur conseille la lecture des « Traîneux de pied, Édition Boréale », parce que nous avons été les premiers à se syndiquer dès le milieu des années soixante dans la fonction publique. Nous avons une historique de lutte syndicale dont nous sommes fier-e-s.

À Montréal, j’aimerais souligner la présence de Manon Massé ainsi que plusieurs candidat-e-s de Québec Solidaire qui sont venu-e-s nous appuyer sur les lignes.

 

Si le monde en général voulait vous appuyer, quelles actions ils pourraient faire?

 

En premier, lorsque vous allez à la SAQ, vous pouvez remplir un sondage. Donc, si vous écrivez que vous aimeriez que les employé-e-s aient une bonne convention collective, ça serait super apprécié (vous pouvez aussi dire que le boss était au téléphone tout le long dans son bureau)! Ensuite, ne soyez jamais gêné-e-s de demander à parler au boss (même s’il est dans son bureau) de succursale afin de lui dire que vous trouvez inacceptable que l’employeur ne règle par le conflit de travail avec les employé-e-s. Si vous mettez la main sur des collants, gâtez-vous! Dites surtout aux travailleurs et travailleuses que vous les appuyez!

 

Les autres syndicats, ils peuvent faire quoi pour vous backer?

 

NE PAS PASSER NOS LIGNES DE PIQUETAGES, s’il-vous-plaît!

 

Solidarité et bonnes prochaines journées de grève!

 

Si vous voulez suivre les négociations et les journées de grèves suivantes, vous pouvez le faire via la page Facebook du SEMB-SAQ (CSN) : https://www.facebook.com/semb.saq/

 

** Grève perlée : qui interrompt l’activité d’une entreprise par une succession de petits arrêts de travail. Comme la camarade dit : « C’est à dire qu’on vote pour 6 jours, mais qu’on peut les utiliser une journée à la fois. Ça rend l’employeur plus nerveux parce qu’il ne sait pas quand on va sortir versus une grève illimitée. »

Travailleur du communautaire : Pourquoi je manifeste le 1er mai

Je travaille comme intervenant dans le milieu communautaire depuis quelques années. Avant ça, j’ai eu un tas de jobs différentes dans plusieurs industries. Plongeur, sondeur téléphonique, caissier, aide-cuisinier, manutentionnaire, peintre en bâtiment, concierge, commis, préposé au service à la clientèle, name it.

Le mal a peut-être changé de place, mais la situation change pas tant : j’ai toujours un employeur qui profite de moi. Sauf que cette fois-ci, l’employeur, il a une mission « humaniste » derrière laquelle se cacher. Et si ce n’est pas l’employeur directement qui en veut plus de moi pour le moins possible, ce sont les bailleurs de fonds, privés ou étatiques.

Je ne suis pas seul. Les travailleuses (et travailleurs) du communautaire ne l’ont pas facile. Des raisons de manifester et d’être écoeuré-es, il ne nous en manque pas.

Nos conditions ne s’améliorent pas. Nos salaires stagnent. Beaucoup sont en mode survie d’une paie à l’autre. Et pourtant, on nous en demande de plus en plus. L’État se déresponsabilise : les services publics et le filet social mangent la volée, les personnes avec qui l’on travaille aussi par le fait même, nous devons donc compenser avec les moyens du bord.

Le mode de financement des organismes nous garde systématiquement en précarité. Nos postes sont subventionnés au « projet », souvent pour un an, sans aucune garantie d’être renouvelés. On bosse donc à tisser des liens avec des personnes qu’on aide et accompagne (parce qu’on travaille avec des êtres humains, souvent maganés), sans trop savoir si dans six mois, un an, nous pourrons continuer. C’est aussi inquiétant pour nous que malsain pour les relations que nous tentons de maintenir avec les gens qui fréquentent nos ressources.

On se brûle. Comme dans le système de santé, les cas de burn out sont monnaie courante. Dans quasiment tous les organismes avec lesquels je collabore dans le cadre de mon travail, il y a au moins une personne ayant été en arrêt de travail maladie dans la dernière année. Et quand une personne quitte, avec nos charges de travail qui augmentent, ce sont d’autres travailleuses ou travailleurs qui se magasinent un épuisement professionnel. C’est le burn out musical…

Heureusement, nous ne sommes pas seul-e-s. Il y a de quoi s’inspirer du mouvement des infirmières et des employé-e-s de la santé. Des voix s’élèvent. On s’organise petit à petit. Il n’en tient qu’à nous à se mobiliser. Notre meilleure arme demeure notre solidarité, qu’importe où nous travaillons. Organisation communautaire, intervention, animation, on travaille toutes et tous en collaboration et nous sommes dans le même bateau (qui fuit…). C’est pourquoi, que vous travaillez dans le communautaire, en santé, en restauration, en construction, etc., le 1er mai, je marche avec vous.

 

Solidarité,

Un membre du comité communautaire du Syndicat Industriel des Travailleurs et Travailleuses (SITT-IWW Montréal)

Est-ce que les planteurs et planteuses d’arbres ont le syndrome de Stockholm?

Portrait de l’industrie du treeplanting

Autrefois un moyen de vivre une vie respectable et digne, le treeplanting n’est plus qu’un lieu pour vivre un lifestyle contre-culturel entre vagabondes et vagabonds et entre étudiantes et étudiants cherchant une alternative au salaire minimum. Aujourd’hui, la possibilité de dépasser le seuil de la pauvreté n’est réservée qu’aux meilleur-es d’entre nous qui feront une très longue saison d’ouest en est du pays. Il n’y a pas de confusion possible. Les salaires n’ont pas augmenté depuis belle lurette. Lorsqu’on demande pourquoi, la réponse est toujours la même : il n’y a pas suffisamment d’argent, ou bien on se fait simplement dire de la fermer.

Les pratiques ultras compétitives de l’industrie sont à blâmer. Toutes ces années, les compagnies ont férocement maintenu leur part du marché au détriment de nos salaires. Elles laissent souvent sur la table plusieurs milliers de dollars pour gagner leur soumission. C’est-à-dire le montant d’argent qui sépare la soumission la plus basse de son plus proche compétiteur. Et si les autres compagnies qui paient au standard de l’industrie n’ont pas jugé possible de soumissionner aussi bas, alors où ont-ils coupé? Dans notre sécurité? Dans le budget de la cuisine? Dans nos salaires?

Dans tout cela, nous n’avons pas notre mot à dire. Il ne faut surtout pas donner notre opinion sur les pratiques de l’industrie ou celle de notre compagnie. La production doit continuer, mais la production pour qui? « Si t’es pas content, si t’es pas contente, trouve une autre job »… Une réalité qui se cristallise dans la figure du contremaître qui systématiquement demande des candidatures ayant « bonne attitude ».

Ils et elles ne veulent surtout plus nous entendre nous plaindre des salaires démesurément trop bas pour un travail démesurément trop difficile. Ils et elles ne veulent plus écouter nos plaintes, alors qu’ils et elles ne font rien pour nous. Et ne feront rien! Pourtant, qui paie le prix de leur irresponsabilité et de leur avarice sans fin? C’est nous, car nos salaires constituent les plus grands frais d’exploitation. Des salaires plus bas ça se traduit par plus de contrats et plus d’argent pour eux et elles. Mais, aussi par plus de précarité pour nous; plus de blessures parce que nous ressentons toujours plus de pression à performer pour nous assurer de payer notre loyer, notre nourriture, notre scolarité, nos loisirs… Dont les prix ne cessent d’augmenter chaque année! Mais le bal ne s’arrête pas là. Ils et elles « oublient » parfois d’inscrire nos heures de transport dans nos heures totales travaillées, nous intimident lorsqu’on veut prendre notre CSST (WCB), nous font travailler gratuitement lorsqu’il faut démonter et remonter le campement, laissent les douches à l’abandon, ne fournissent pas un budget suffisant à la cuisine… Et le comble, nous devons payer 25$ par jour pour chier dans les toilettes que nous avons, nous-mêmes, creusées.

Le syndrome de Stockholm

Mais, nous sommes aussi à blâmer. Car, pour chaque jour qui passe, nous continuons de danser sans jamais oser mettre notre pied à terr. Nous préférons regarder toute la journée nos camarades planter des arbres lorsqu’ils et elles ont une tendinite. Parfois même au point d’en avoir aux deux poignets. Nous ne voulons pas voir notre reflet en eux et elles, mais plutôt des compétiteurs et compétitrices. Lorsqu’une personne est forcée de travailler blessée, parce qu’intimidée ou parce qu’on lui refuse une forme de compensation, c’est nous tous et toutes qui payons le prix. Avez-vous déjà survécu une saison sans qu’il y ait de tendinites sur votre campement? Ça sera votre tour bientôt et vous n’aurez vraisemblablement aucune aide ou compensation. Si ça n’a pas déjà été le cas. C’est la blessure la plus fréquente, mais il y a aussi les infections par manque d’hygiène puisque les douches ne fonctionnent pas. Il y a les entorses lombaires et les chevilles foulées. Puis finalement, quand vient le temps de tirer notre révérence, il y a les tendinites chroniques et le genou défoncés. Parfois, c’est aussi les pneumonies qui se propagent ou on ne sait quel virus et les empoisonnements alimentaires. Sans compter le harcèlement et les agressions, entre nous et par le patronat, dont on ne parle jamais et qui pourtant sévissent chaque été.

Malgré tout cela, nous ne nous contentons pas d’observer avec indifférence notre agonie collective. Nous avons complètement adopté le discours de nos boss qui nous disent de toujours travailler plus fort. On se fait la compétition entre nous. On se met la pression entre nous. Plus besoins de police sur le campement, nous sommes notre propre police. Cette réalité, elle se retrouve dans la figure emblématique du highballer. Celui ou celle qui représente le plus haut degré de l’accomplissement de l’échelle sociale au treeplanting. Parfois, même des légendes se forment autour de ces figures. Et pourtant, la valeur de ces personnes ne se mesure que dans leur production et jamais dans leur individualité. Par effet antagonique, nous ne nous percevons qu’au travers du prisme de la production. Une réalité dont se réjouit le patronat.

Tout cela et nous trinquons sans problème avec nos boss. Nous leur assurons qu’ils et elles sont nos ami-es. Que l’expérience du treeplanting ne pourrait pas être la même sans eux et elles. Effectivement, elle serait bien mieux! Mais, je ne peux m’empêcher de ressentir un goût amer… ami-es? Comment pouvons-nous réconcilier amitié et maltraitance, si ce n’est que nous n’avons aucun respect pour nous même? Nous qui partageons les mêmes conditions, les mêmes problèmes. Nos boss ce sont des hypocrites. Cette relation d’amour-haine que nous développons avec notre emploi, elle n’est pas bien difficile à comprendre. Nous aimons la vie de camp, les soirées inoubliables, les amitiés tissées, les étoiles dans le ciel, les après-midis sur la plage… Nous détestons le travail gratuit, les insultes, les blessures, les crises psychologiques, la pression, les journées et les semaines qui ne terminent plus… Ce n’est pas eux et elles qui rendent nos saisons inoubliables, mais vous. Combien parmi vous avez déjà fantasmé, plusieurs heures durant, mille et une façons de torturer votre contremaître? Ils et elles ne font rien d’autre que nous contraindre à l’expérience de la souffrance et de l’indignité. Des choses qui contribuent à nous souder davantage, mais qui n’est pas notre plaisir en soi.

Les contremaîtres ne sont pas nos allié-es. Ils et elles sont des agents à la solde des compagnies. Le système de rémunération basé sur la production des planteurs et le respect des objectifs de production ne fait qu’agir en tant qu’incitatif à notre exploitation. Le mythe très répandu que les contremaîtres prennent davantage soin de nous lorsqu’ils et elles sont rémunéré-es ainsi est une chose qu’on ne cesse de se répéter. Mais, est-ce vraiment la réalité? La distribution inéquitable des terrains, les avertissements abusifs lorsque la production est trop basse, la pression à dépasser nos limites physiques et mentales semblent démontrer le contraire. Si ce n’est tout simplement pas un travail bâclé pendant que nous payons leurs salaires. N’oublions pas que les contremaîtres ne travaillent pas pour nous, mais c’est nous qui travaillons pour eux et elles.

Et maintenant quoi?

Nous devons cesser de nous plaindre chacun et chacune de notre côté. Cela ne nous permet que de nous réconforter alors que nous chutons toujours vers l’enfer.

Les deux solutions les plus souvent apporter ne nous mèneront nulle part. La première voudrait que les compagnies se rejoignent à une table de discussion pour s’accorder sur prix minimum pour l’industrie en deçà duquel elles ne se feraient pas la compétition. Aussi bien rester dans la passivité et prier que l’argent pousse de nos arbres. L’autre solution serait de former une coopérative. Dans ce modèle, nous aurions effectivement le contrôle de nos conditions de travail, mais nous serions toujours soumis à la dynamique du marché. Le prix de l’arbre devra rester compétitif pour nous permettre d’obtenir les contrats. Ces coopératives demeureront très petites puisqu’elles ne pourront pas se tailler une place dans le marché. Alors qu’en est-il de l’immense majorité de la main d’œuvre qui demeure prisonnière des rookie mills?

L’organisation est la clé

Il nous reste encore une solution : le syndicalisme de solidarité. La seule façon d’améliorer nos conditions de travail, c’est en bâtissant un rapport de force en notre faveur. Pour cela, il faut être solidaire face aux abus patronaux. La plus grande objection faite à l’arrivée d’un syndicat est qu’il ne comprendrait pas la réalité de notre travail et nos besoins. Nous ne ferions que payer des cotisations pour un syndicat qui ne nous représenterait pas. Notre rapport au syndicalisme a été perverti par des centrales syndicales qui aujourd’hui semblent agir plus en tant qu’arme du patronat que comme l’arme de la classe ouvrière. Et pourtant, le syndicalisme est une forme de lutte. Une pratique qui peut être horizontale et sans représentation autre que nous même. Nous pouvons mener cette lutte et faire les gains que nous choisirons collectivement: l’IWW, c’est ce syndicat-là. Des travailleurs et travailleuses qui ont choisi de se réunir, peu importe l’industrie pour organiser leur milieu de travail avec un modèle de syndicalisme qui n’échapperait pas à leur contrôle. Nous serons notre syndicat et personne d’autre.

Notre précarité est plus grande de saison en saison, il faut agir maintenant! Ce texte ne fera pas l’unanimité dans la communauté, comme toutes les publications sur le groupe King Kong Re-forestation dénonçant nos conditions. Certains et certaines voudront nous régurgiter leur culte du highballer. Pourtant cela n’est-il pas le signe d’un malaise profond? Réunissons-nous dès maintenant pour organiser la riposte. Ceux et celles qui souhaitent s’organiser, prenez contact avec nous!

 

Solidairement,

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In english.

 

Crédit photo de couverture: http://www.macleans.ca/news/canada/into-the-wild/

Source image 1 : http://www.replant.ca/phpBB3/viewtopic.phpf=27&t=66036&p=86600&hilit=graphic#p86600

Source image 2 : http://www.replant.ca/phpBB3/viewtopic.php?f=27&t=66856

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Migrant Workers’ Conditions in Middle East is Modern Slavery – and the answer from employing class to radicalised Arab working class of the ’60s

The idea that Dubai is an oasis of freedom on the Arabian peninsular is one of the great lies of our time. Yes, it has Starbucks and Dunkin’ Donuts and the Gucci styles, but beneath these accoutrements, there is a dictatorship built by slaves.

If you go there with your eyes open – as I did earlier this year – the truth is hidden in plain view. The tour books and the bragging Emiratis will tell you the city was built by Sheikh Mohammed, the country’s hereditary ruler. It is untrue.

The people who really built the city can be seen in long chain-gangs by the side of the road, or toiling all day at the top of the tallest buildings in the world, in heat that Westerners are told not to stay in for more than 10 minutes. They were conned into coming, and trapped into staying.

In their home country – Bangladesh or the Philippines or India – these workers are told they can earn a fortune in Dubai if they pay a large upfront fee. When they arrive, their passports are taken from them, and they are told their wages are a tenth of the rate they were promised. Lire la suite

Inébranlé par l’élection syndicale presqu’ex aequo, le syndicat de Jimmy John’s jure de continuer la lutte.

Piquet devant une succursale de la franchise étatsunienne JimmyJohn's

Les travailleurs-travailleuses dénoncent l’activité illégale répandue de la compagnie.

MINNEAPOLIS, E.-U. – Les travailleurs-travailleuses de 10 restaurants franchisés Jimmy John’s à Minneapolis crient à l’injustice après une élection d’accréditation syndicale presqu’ex aequo entachée de comportements douteux de la part du propriétaire de l’entreprise Miklin. 85 prolétaires ont voté en faveur de la syndicalisation et 87 contre, avec deux bulletins contestés inconnus. Selon le National Labor Relations Act, l’égalité revient à l’employeur.

Les ouvriers-ouvrières ont rendus compte de plusieurs preuves évidentes de violation de la loi de la National Labor Relations Act et ce avant que le jour du scrutin. Ces violations comprennent des tentatives de pots de vin à des travailleurs-travailleuse, demander aux employés-ées de porter des broches anti-syndicales, des menaces de licenciements massives, et des licenciements ciblés pour briser le syndicat. L’entreprise MikLin est actuellement accusée de 22 présumées violations de la National Labor Relations Act.

“Nous sommes extrêmement déçus de la conduite de l’entreprise dans cette affaire; plutôt que de simplement nous laisser voter, la direction a choisi d’enfreindre la loi à plusieurs reprises au cours des six dernières semaines. Ils ont dépensé plus de 84 500 $ sur une campagne de dénigrement anti-syndicale vicieuse, c’est plus de 1000 $ par vote pour le «non». Nous ne reconnaissons pas ces résultats de l’élection comme légitime et continuerons à nous battre pour nos revendications “, a déclaré Erik Forman, un travailleur au Jimmy John’s et membre du syndicat.

Ayo Collins, un livreur, a déclaré le syndicat «n’a pas mis tous ses oeufs dans le même panier» et a encore plusieurs pistes d’action devant eux. Il dit que le syndicat envisage d’engager une poursuite judicière contre la compagnie au sujet de son inconduite au court de la période pré-électorale.

“Dans une entreprise avec un roulement d’employé proche de 50% par mois, une majorité à un instant donné signifie beaucoup. Nous avons un mandat, plus de 85 d’entre nous se concacrent à la poursuite de la lutte pour des salaires décents, une planification d’horaire cohérente, des jours de maladie, et pour le respect et la dignité de base que tous les travailleurs-travailleuses méritent. Ce n’est que le début de la lutte “, a déclaré Collins.

Le syndicat des travailleurs-travailleuses du Jimmy John’s, ouvert à tous et toutes les employés-ées de cette compagnie au niveau nationale, est le premier syndicat de restauration rapide du pays, et est affilié au Syndicat Industriel des Travailleurs-Travailleuses.

Ayant gagné en renommée ces dernières années pour avoir organisé les travailleurs et les travailleuses des cafés Starbucks, le Syndicat Industriel des Travailleurs-Travailleuses est un syndicat international fondé il y a un siècle pour tous les gens qui travaillent.

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Des pilotes de ligne réduits à l’aide alimentaire

Des pilotes fatigués, sous-payés, malades. Danger ?

Les IWW ne partagent pas les mêmes idées que Michael Moore sur les solutions à apporter à la crise du capitalisme, ni sur le fait que la cause actuelle de cette crise soit la “recherche du profit”. Pour nous, le problème est le capitalisme lui-même, et la véritable solution à long terme réside dans l’abolition du salariat et l’instauration d’une démocratie directe dans toutes les sphères de la société, y compris dans l’économie. Mais la problématique soulevée ici par le polémiste américain illustre bien la phase d’appauvrissement que traversent présentement les travailleurs et travailleuses.

Interdiction de prendre un arrêt maladie. Des salaires au lance pierre qui les contraignent à faire appel aux services d’aide alimentaire. Un deuxième job chez Starbucks pour boucler les fins de mois. Invité en cabine par les pilotes lors d’un vol intérieur aux USA, Michael Moore raconte la face cachée du rêve américain.

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Sous-Traitance : Un monde bien compliqué

Pris sur Courant Alternatif
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Donc, promis, juré, les industriels qui vont être aidés ne délocaliseront plus… Ils l’ont juré la main sur le coeur. Et ils vont certainement tenir leur promesse. Car ça veut dire quoi, délocaliser, et surtout ne pas délocaliser ??? Quand Renault rachète Dacia, une entreprise roumaine, ce n’est pas de la délocalisation, c’est un investissement à l’étranger. Et s’il rachète cette usine, ce n’est pas pour la fermer, ni pour y envoyer ses propres salariés avec des salaires d’expatriés évidemment. Mais si Renault possède des usines en Roumanie qui emploient des ouvriers roumains, il est normal qu’il y produise des bagnoles. Renault ne rachète pas Dacia seulement pour produire des Dacia, il rachète Dacia aussi pour produire des Renault en Roumanie. Donc, des ouvriers roumains en Roumanie produisent des Renault qui seront achetés par ceux qui ne sont pas encore licenciés en France, mais ce n’est pas de la délocalisation. Vous me suivez ?

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