Pratiques anti-syndicales au Frite Alors

En date du 12 septembre 2016, les travailleurs du Frite Alors de la rue Rachel n’ont plus le droit de recourir à d’anciens collègues pour se faire remplacer, a décidé le patron de la succursale Jean Jurdant. Cette pratique courante avait souvent permis à des travailleurs de la chaîne de se faire remplacer sans avoir à surcharger leurs collègues. Nous avons recueilli les propos de Félix Vincent Ardea, un ancien collègue qui a effectué à plusieurs reprises des remplacements pour les travailleurs du Frite Alors.

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Jean Jurdant en discussion avec les forces de police lors de l’occupation ayant résulté du congédiement illégal de Morgane M.P. le 31aout dernier.



Pouvez-vous expliquer brièvement qui vous êtes et votre lien au Frite Alors Rachel?

« J’ai travaillé au restaurant pendant 10 mois jusqu’à ma démission en mai dernier. Mes collègues ont toujours apprécié la qualité de mon travail et de mon attitude avec eux et avec les clients de la chaîne. Jusqu’à samedi dernier, j’ai effectué plusieurs remplacements pour mes anciens compagnons de travail lorsqu’ils avaient besoin de prendre congé et n’avaient personne pour les remplacer. »

Qu’est-ce qui a changé samedi dernier?

« J’avais effectué un remplacement la semaine précédente. Comme j’avais largement dépassé les trois mois de service pour le restaurant, j’ai présumé que je bénéficierais de l’augmentation de salaire gagnée par le syndicat pour les travailleurs de cuisine. Lorsque j’ai reçu mon talon de paye et que j’y ai lu que j’avais été payé au salaire minimum, j’ai d’abord cru à une erreur administrative et j’ai appelé le patron, Jean Jurdant, pour que la situation soit corrigée. Il m’a assuré qu’il ne s’agissait effectivement que d’une erreur, et que celle-ci serait corrigée par le comptable, Michel Croisettière, le lundi suivant.

Monsieur Croisettière m’a appelé le lendemain, jour où j’étais d’ailleurs supposé remplacer pour le quart de soir. Il m’a dit essentiellement que, n’ayant pas travaillé depuis le mois de juillet précédent, je serais payé au salaire minimum. J’ai ensuite rappelé Monsieur Jurdant pour lui signifier que je n’accepterais pas de travailler en dessous du salaire de travailleur syndiqué et lui proposer à nouveau de faire le remplacement pour 11,50$/h, ce qu’il a accepté. »

Pourquoi était-ce important pour vous de bénéficier de l’augmentation de salaire?

« L’important pour moi n’était pas le salaire en tant que tel. Sur les quelque 15 heures travaillées, l’augmentation représentait environ 11,25$. Je crois d’abord que si j’acceptais de faire le travail que les syndiqués font pour un salaire moindre, mon action aurait pour impact d’affaiblir la position du syndicat. Il y avait aussi là une question de dignité, ne valais-je pas au moins autant que des collègues ayant une ancienneté et une qualité de travail sensiblement équivalente à la mienne? »

Comment le patron a-t-il réagi à votre action?

« J’ai appris à travers mes anciens compagnons de travail que le patron a exigé qu’il n’y ait plus de remplacements effectués par d’anciens travailleurs de la chaîne. Cette décision m’affecte de manière personnelle, car même si je ne dépendais pas de cette source de revenu, elle me permettait parfois d’arrondir les fins de mois.

Par contre, je crois qu’elle aura un effet beaucoup plus dommageable sur les travailleurs du Frite Alors. Étant donné que le resto roule avec une petite équipe, si quelqu’un tombe malade ou doit prendre congé pour quelque autre raison, quelqu’un devra nécessairement prendre plus de quarts, ce qui est parfois impossible en raison des études que poursuivent plusieurs des employés, ou parce que d’autres travaillent déjà 5 jours par semaine ou plus.

Selon moi, cette décision n’a de sens que si on la replace dans le contexte de la syndicalisation du Frite Alors. Le patron veut s’attaquer au syndicat, et il a déjà échoué à y aller directement par le renvoi d’une syndiquée. Il compte donc essayer d’y aller par la bande en empêchant les travailleurs d’avoir des congés, et en empêchant un ancien de leur collègue soutenant le syndicat de travailler avec eux. »

En date de publication, nous venons d’apprendre qu’un des membres du syndicat vient de voir son nom être retiré de l’horaire de façon permanente pour un congé qui, selon la norme en vigueur avant le début du processus de syndicalisation, aurait dut lui être accordé. Un.e représentant.e de la section locale du SITT-IWW essaiera aujourd’hui d’entrer en contact avec Jean Jurdant à ce sujet. Plus de nouvelles suivront.

2 réponses
  1. Olivier Comeau
    Olivier Comeau says:

    Bel article.

    Petite faute d’orthographe dans le commentaire à coté de la photo en fin de texte.

    Discussion et non “discution”, non?

    Bonne journée!

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