Réclamer le respect… un strict minimum

La branche montréalaise du SITT-IWW a, depuis quelques années maintenant, une campagne qui lui est propre et unique, lancée le 8 mars 2018 lors de la Journée Internationale des Luttes des Droits des Femmes.

Elle a pour titre : ‘Réclame Ton Respect’.

Partie sur l’idée de dé-macho-iser le milieu syndical et se réapproprier les luttes syndicales, certain-e-s membres du syndicat ont décidé de monter une campagne qui lui ressemble : mettre fin aux oppressions sur les milieux de travail, que ce soit du sexisme, du harcèlement, de l’homophobie, du racisme ou même de la transphobie.

Un Réclame Ton Respect, comment ça se passe ?

Ça commence par un-e employé-e qui contacte le SITT-IWW pour l’aider avec une problématique sur son milieu de travail. S’enclenche ensuite une mise en marche soit rencontrer la ou les personne-s, discuter et faire un plan de match. Cette campagne vise à collectiviser une problématique car les personnes victimes sont souvent isolées et en détresse (alors que, la plupart du temps, plusieurs autres, sur le même plancher de travail, vivent la même réalité).

Chaque campagne et chaque réalité sont différentes.

Une histoire de campagne victorieuse

Je vais parler ici de mon expérience d’une campagne menée, en tant qu’organisatrice externe à cette campagne. Le SITT-IWW n’est pas un syndicat de service mais bien un syndicat de solidarité : empowerer les travailleurs et travailleuses sous notre mantra : chaque travailleuse et travailleur est une organisatrice ou organisateur syndical.

Nous avons été approché-e-s par des employée, Max* et Camille*, car elles et certain-e-s de leurs collègues vivaient du harcèlement, de l’intimidation, du racisme, de l’homophobie et tellement d’autres horreurs, et ce, par leur patron. Cela devait cesser !

Lors de notre première réunion, Max et Camille avaient déjà réussi à réunir les 3/4 de leurs collègues autour d’une table.
C’était irréel pour moi qui m’en allait jaser de comment on solidarise nos collègues…
Wow, le travail était déjà fait ! Quelle belle réunion mais en même temps avec un goût doux-amer, tout le monde était solidaire parce que tout le monde avait été violenté-e-s par ce même boss, certains hommes présents, n’avaient pas vécu la chose mais étaient solidaires de leurs collègues. 

Ensemble, on est plus fort-e-s, exactement !

Toutes ces personnes parlaient des horreurs faites par leur boss et avaient déjà décidé d’envoyer une lettre à leur Comité d’Administration (C.A.), et ce, en bypassant leur boss/manager problématique. La hiérarchisation est parfois en elle-même problématique, leur boss étant leur seul lien avec le C.A.

Il a fallu trouver les adresses électroniques des membres du C.A., faire une liste claire de demandes tout en énumérant les faits reprochés, tenir des journaux de bord pour preuves, planifier des réunions futures mais surtout, planifier ce qu’on allait faire suite aux différentes réponses possibles du C.A.

Quel était notre véritable levier ? Ici c’était atteindre l’image publique de l’organisme.

On a commencé par cette dite-lettre, signée par les 3/4 de la shop, tout en gardant en tête qu’ultimement, publiquement, la problématique pourrait ressortir, notre seul véritable levier avant des démissions collectives par exemple. L’idée étant d’avoir le gros bout du bâton et pouvoir réclamer un milieu de travail sain ! Le strict minimum !

Un milieu de travail sain… bien sûr que c’est légitime ! C’est un droit qui est si difficilement accessible et les conseils d’Éducaloi, par exemple, sont ridicules quand on vit une situation problématique. L’action directe et la solidarité sont la clé de gains rapides et efficients.

La lettre fut envoyée, sans oublier de donner un délai de réponse afin que ça ne tombe pas dans les craques du plancher. La lettre fut reçue et le boss problématique a été interdit de la réunion du C.A. suivante. Ce fût une petite victoire déjà en soi !

La suite ? Le C.A. a demandé à rencontrer les personnes 1-à-1 et de signer une lettre de confidentialité. Les 2 demandes ont été refusées par le groupe. Notre force c’est la solidarité et on a appris par la bande que ce même boss avait déjà été viré pour les mêmes problématiques ailleurs… et sous couvert de la confidentialité, personne ne pouvait donc vraiment le savoir ! C’est indécent de remettre des personnes problématiques en situation de pouvoir encore et encore et ce, sous le chapeau du volet confidentiel et donc en toute connivence… ark ! Plutôt que changer et éduquer, c’est ça, pelletons le problème dans la cour du voisin en se mettant des oeillères ! Neunon !

Finalement, des rencontres ont été faites, en groupe, les demandes ont été acceptées dont : virer le boss et avoir une voix, un-e représentant-e des employé-es, sur le C.A.

Écrit ainsi, cela semble facile… ce ne l’a pas été. Ça a été tout un challenge émotionnel, tout un challenge de garder, pendant des mois, des gens solidaires entre elles et eux sans se démonter malgré les stratégies mises en place par le patronat. Mais quelle belle victoire que de se débarrasser d’un oppresseur (qui malgré les efforts d’éducation ne changeait pas) et de pouvoir avoir enfin la chance d’exprimer le point de vue des travailleuses et travailleurs à la plus haute instance de la compagnie !

On a réussi malgré les hauts et les bas, les réticences, les erreurs et les apprentissages, à travers toutes ces petites victoires cumulées !
Boss viré, milieu de travail assaini !

La culture du silence doit cesser.

 
Réclame Ton Respect c’est ici la réappropriation de son milieu de travail et un pas de plus vers l’équité et le respect, finalement, vers la normalité.

Bravo à elles et eux ! Solidarité !

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